Crystal Palace (palais d'exposition)

Crystal Palace
Vue générale du Crystal Palace reconstruit à Sydenham (1854).
Présentation
Type
Palais, serre, lieu pour des événements (), installation sportive
Fondation
Styles
Glass architecture (), architecture victorienne
Architectes
Ingénieur
Matériau
Ouverture
Démolition
Occupant
État de conservation
démoli ou détruit ()
Localisation
Localisation
Coordonnées
51° 25′ 20″ N, 0° 04′ 33″ O

Le Crystal Palace (en français : « Palais de cristal ») était un vaste hall d'exposition en fonte et verre plat d'abord édifié au Hyde Park de Londres pour abriter l'Exposition universelle de 1851. Elle s'est tenue du 1er mai au 15 octobre 1851, et plus de 14 000 exposants du monde entier s'y sont réunis dans les 92 000m2 du bâtiment afin de montrer leurs innovations technologiques réalisées dans le cadre de la révolution industrielle. Le palace, dessiné par Joseph Paxton, faisait 564 mètres de long et était doté d'une hauteur intérieure de 39 mètres[1], soit trois fois la taille de la cathédrale Saint-Paul[2].

Les 60 000 panneaux de verre sont construits par les Chance Brothers [3]. Le bâtiment est intégralement construit en 39 semaines. Le Crystal Palace était alors dotée de la plus grande surface en verre jamais vue dans un bâtiment. La présence de vitres permettait notamment de moins recourir aux lumières artificielles.

Certains historiens suggèrent que le nom Crystal Palace viendrait d'un article écrit en juillet 1850 par le dramaturge Douglas William Jerrold dans le magazine satirique Punch au sujet de l'exposition universelle à venir, considérant qu'il s'agirait d'un « palais de cristal »[note 1],[4].

Après l'Exposition universelle, le Palace est démonté et reconstruit, sous une forme agrandie, au sud de Londres. Il est alors monté sur Penge Peak, près de Sydenham Hill. Il reste à cet endroit de juin 1854 à novembre 1936 lorsqu'il est détruit par le feu. Le quartier dans lequel il était situé est renommé en son hommage. Le Palace était également situé dans un parc public qui accueillait le Crystal Palace National Sports Centre, un ancien stade de football qui avait accueilli la finale de la Coupe d'Angleterre de football de 1895 à 1914. Le Crystal Palace FC avait été créé et jouait dans ce stade. Le Crystal Palace était un haut lieu touristique, qui attirait une population diversifiée. Sa technique de construction en éléments standardisés préfigure celle de la préfabrication en architecture.

Bâtiment original de Hyde Park

Conception

La façade du Crystal Palace.
Le Crystal Palace lors de l'Exposition universelle.

L'immense édifice modulable en fer, bois et verre[5] est initialement construit à Hyde Park, Londres afin d'accueillir l'Exposition universelle de 1851[6]. La commission chargée du montage de l'exposition est instaurée en janvier 1850, et l'entièreté du bâtiment est financé grâce à une souscription publique. Un comité de supervision de la construction est rapidement formé afin d'approuver l'architecture et la construction du bâtiment. En faisaient partie les ingénieurs de renom Isambard Kingdom Brunel et Robert Stephenson, les architectes Charles Barry et Thomas Leverton Donaldson. Le comité était dirigé par William Cubitt. Au 15 mars 1850, les critères de sélection des propositions sont annoncés : le bâtiment devait être temporaire, simple, aussi peu cher que possible et que sa construction soit rapide et complétée avant le 1er mai 1851[7].

En trois semaines, le comité reçoit 245 candidatures dont 38 venant de l'étranger, dont l'Australie, les Pays-Bas, la Belgique, Hanovre, la Suisse, Brunswick, Hambourg et la France. Deux propositions, toutes deux en fer et verre, étaient particulièrement intéressantes, une par Richard Turner qui avait participé à la création de la Palm House des Jardins botaniques royaux de Kew et l'autre de l'architecte français Hector Horeau[8]. Malgré le grand nombre de propositions, aucune d'entre elles n'est retenue par le comité. Turner est furieux de cette décision et attaque les membres du comité en demandant des compensations. Son projet à 300 000 £ (tout comme celui de Horeau) était considéré comme trop coûteux[9].

Le comité finit par établir une proposition tout seul d'un bâtiment en briques dans le rundbogenstil (style arc en plein cintre) construit par Donaldson comprenant un dôme en tôle dessiné par Tunnel[10]. Ce projet est vivement critiqué et ridiculisé par la presse[11]. Conformément aux souhaits du comité, le site de construction du bâtiment n'est pas encore rendu public. Le site privilégié était Hyde Park, près du Princes Gate et de Pennington Road, mais d'autres propositions incluaient Wormwood Scrubs, Battersea Park, l'Île aux Chiens, le Parc Victoria et Regent's Park[7].

Les opposants au projet ont milité fermement contre la construction du bâtiment à Hyde Park et étaient soutenus par The Times. Le plus connu d'entre eux était Charles Sibthorp , qui considérait l'exposition comme « l'une des plus grandes escroqueries, fraudes et absurdités jamais connues »[7]. Il éprouvait une haine viscérale envers l'exposition et le bâtiment, y compris après la fin de l'évènement.

Le paysagiste de renom Joseph Paxton est alors intéressé par le projet et, avec le soutien du membre de la commission Henry Cole, décide de proposer son projet. À ce moment, Paxton était essentiellement connu pour sa carrière de paysagiste pour le duc de Devonshire à la Chatsworth House. En 1850, Paxton était devenu une figure éminente de l'horticulture britannique et devenait également connu pour sa qualité de dessinateur de jardins. Il avait notamment conçu les jardins avant-gardistes du Parc Birkenhead qui ont influencé la conception de Central Park à New York[12].

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Le premier croquis au crayon et à l'encre du Crystal Palace par Joseph Paxton, c. 1850.
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La statue du prince consort Albert à Perth, en Écosse.

Lorsqu'il travaillait à la Chatsworth House, il a très fréquemment travaillé autour de verrières et a développé une technique de construction en modules utilisant des vitres, des pièces de fer forgé préfabriqué et des planches de bois, tous de taille standardisée. Le conservatoire de Chatsworth qu'il a construit en 1836 était la première concrétisation de cette technique. Grâce à celle-ci, le bâtiment en verre était le plus grand du monde avec une superficie de près de 2 600 m2[12].

Près d'une décennie plus tard, s'appuyant sur l'avancée technologique des nouveaux panneaux de verre en fer forgé, Paxton a encore amélioré ses techniques en construisant la Chatsworth Lily House, qui comprenait un toit plat et un système de rideaux qui permettait de suspendre des baies vitrées verticales grâce à un système de vérins[13]. La Lily House est construite spécifiquement pour accueillir des nénuphars géants qui venaient d'être découverts par les botanistes européens ; le premier spécimen à avoir été rapatrié en Angleterre était conservé aux jardins de Kew, mais n'étaient pas entretenus correctement. La réputation de jardinier d'excellence de Paxton l'a poussé à emporter cette plante rare et fragile à Chatsworth. Le nénuphar qu'il avait récupéré aux jardins de Kew ont bénéficié d'un excellent traitement de sa part et en 1849, il devient un véritable phénomène national après avoir été le premier à faire reproduire des grands nénuphars en Angleterre. Sa fille Alice apparaît en illustration dans les journaux, debout sur l'une des plantes. L'ensemble de ces contributions à l'architecture et au monde botanique britannique ont conduit naturellement Paxton vers la conception du Crystal Palace. Par la suite, il a admis que les feuilles de nénuphars avaient été une grande inspiration pour les verrières du palace[14].

Après une réunion avec Henry Cole le 9 juin 1850, Joseph Paxton se rend immédiatement à Hyde Park où il prend connaissance des lieux. Deux jours plus tard, le 11 juin, alors qu'il assiste à une réunion du conseil de la Midland Railway, Paxton réalise un premier croquis du bâtiment à l'encre sur une feuille de papier buvard rouge. Ce dessin à main levée (aujourd'hui conservé au Victoria and Albert Museum) comprend les principales caractéristiques du bâtiment final. L'ingéniosité et l'assiduité de Paxton permettent à toutes les mesures et à l'estimation des coûts d'être faits en moins de deux semaines. La statue du prince consort Albert située à Perth en Écosse tient un plan du Crystal Palace dans sa main. Cette statue est inaugurée par la reine Victoria en 1864[15].

Ce projet est un pari risqué pour Paxton, mais les circonstances étaient en sa faveur : il bénéficiait d'une réputation nationale en tant que paysagiste et constructeur et était persuadé que sa conception était parfaitement adaptée à la commande. La pression mise sur commission pour trouver un architecte et construire sa conception se faisait de plus en plus importante, avec l'inauguration de l'exposition dans moins d'un an. La proposition de Paxton remplissait et dépassait même toutes les attentes de la commission et il s'est avéré que la construction coûterait encore moins que tous les autres projets de la même taille. Son projet avait un coût estimé à 85 800 £, soit deux fois et demie plus que celui du Great Stove de Chatsworth[16] mais seulement 28 % du budget demandé par Richard Turner. Sa superficie est estimée à 18 acres (7,2 hectares), soit environ 25 fois plus élevée que celle du projet de Turner.

L'offre la plus basse pour le contrat de construction est proposée par le constructeur Fox, Henderson and Co. La commission accepte le projet et donne son approbation publique au projet de Paxton en juillet 1850. L'architecte dispose désormais de moins de huit mois pour finaliser ses plans, fabriquer les pièces et ériger le bâtiment à temps pour l'ouverture de l'exposition, prévue pour le 1er mai 1851. Paxton conçoit et construit la plus grande structure en verre jamais créée en moins d'un an dans les délais et le budget prévus.

Il modifie même légèrement la conception du bâtiment avant le début du chantier en ajoutant un transept vouté traversant le centre du bâtiment afin d'en renforcer la stabilité et la solidité.

Architecture

L'avant (gauche) et l'arrière (droite) du bâtiment tels que Paxton les a dessinés.

La conception modulaire du palace de Paxton met en avant son ingéniosité et sa capacité à résoudre des problèmes. Le bâtiment dispose de plusieurs avancées technologiques majeures, offrant de réels avantages qu'aucun bâtiment conventionnel ne disposait jusqu'alors et symbolise et démontre la supériorité industrielle et technique du Royaume-Uni d'alors[17].

La symétrie du Crystal Palace est un parfait exemple des obstacles rencontrés par les concepteurs de l'époque entre leurs ambitions et les contraintes liées à la production des différents éléments qui forment le bâtiment. Ainsi, la forme et la taille du bâtiment tout entier sont directement basées sur la taille des vitres fournies par les Chance Brothers de Smethwick. Elles étaient les plus grandes disponibles à l'époque, mesurant 25 cm de large sur 120 cm de long[18]. En conséquence, puisque les vitres produites à des dizaines de milliers d'exemplaires sont l'élément central de la construction du bâtiment, leurs coûts de production et d'installation sont drastiquement réduits. Ils étaient alors les seuls vitriers capables de répondre à une commande si importante et emploient même des ouvriers français afin de respecter les délais.

Le bâtiment original de Hyde Park était essentiellement une vaste salle rectangulaire à toit plat. Une immense galerie ouverte courait le long de l'axe principal, avec des ailes s'étendaient de chaque côté. L'espace d'exposition principal était haut de deux étages, l'étage supérieur étant plus petit que le premier. La majeure partie du bâtiment avait un toit plat à l'exception du transept central qui était couvert par un toit arrondi de 22 mètres de large qui s'élevait à 51 mètres de haut. L'unité de toiture de base prenait la forme d'un long prisme triangulaire, ce qui le rendait à la fois extrêmement léger et très solide et rendait possible sa construction avec une quantité minimale de matériaux.

En multipliant ces unités, la structure pouvait être étendue pratiquement à l'infini. Dans sa forme originale, le sol du Crystal Palace mesurait 563 m sur 139 m, ce qui équivaut à 77 unités de long sur 19 de large[19]. Toutes les unités étaient maintenues les unes par les autres. Le toit avait également été pensé pour l'évacuation des eaux de pluie d'une telle surface. Tout comme la Lily House de Chatsworth, la majeure partie du toit avait un profil horizontal et les fortes pluies pouvaient augmenter la possibilité d'effondrement des vitres. La pluie pouvait s'échapper du toit grâce à gouttières en bois situées le long de chaque section du toit. Lors de leur construction, ces gouttières ont servi de rails au transport des unités de toit[20].

Maintenir une température confortable dans un tel bâtiment en verre était un autre défi majeur, puisque l'exposition s'est tenue des décennies avant la l'invention de l'électricité et de la climatisation. Les verrières sont initialement destinées à conserver la chaleur diffusée par le Soleil, mais accumuler trop de chaleur pouvait causer de nombreux problèmes à l'occasion de l'exposition, sans compter la chaleur humaine des milliers de visiteurs. Paxton met en place deux solutions ingénieuses contre ce problème. D'une part, il fait étendre de grandes toiles de tissu en dessous du toit. Ces toiles permettent de réduire la transmission de la chaleur, de modérer et d'atténuer la puissance de la lumière entrant dans le bâtiment mais aussi de refroidir le bâtiment lorsqu'elles sont aspergées d'eau. De l'autre, un système de ventilation. Chaque module composant les murs extérieurs du bâtiment était disposé d'un ensemble de persiennes préfabriquées qui pouvaient s'ouvrir et se fermer à l'aide d'un mécanisme et permettant à l'air froid d'entrer et à l'air chaud de sortir[21].

Construction

L'intérieur du Crystal Palace.

Fox, Henderson and Co débute le chantier en juillet 1850 et érige des palissades en bois tout autour du site avec des planches qui sont incorporées au bâtiment pour en faire le plancher à la fin des travaux. Le Crystal Palace est construit par un total d'environ 5 000 ouvriers qui travaillent vite et bien mais gagnent peu. Au maximum 2 000 ouvriers travaillent en simultané sur le site. Plus de mille colonnes en fonte soutenant 2 224 poutres en treillis et 48 kilomètres de gouttières sont construites, pour un total de 4 000 tonnes de fonte[22],[23].

Tout d'abord, des piquets sont enfoncés dans le sol pour marquer grossièrement les emplacements des colonnes en fonte ; ces points sont ensuite établis avec précision par des mesures au théodolite. Ensuite, les fondations en béton sont coulées et les plaques de base des colonnes y sont fixées. Une fois les fondations en place, le montage des modules se réalise rapidement.

La construction se déroule bien avant l'apparition des grues motorisées ; le levage des colonnes s'effectuait manuellement à l'aide de bigues. À l'aide de poulies et de cordes suspendues au sommet de l'appareil, les ouvriers hissent les colonnes, les poutres et les autres pièces en place. Dès que deux colonnes adjacentes étaient érigées, une poutre était hissée puis boulonnée sur elles. Les colonnes sont érigées par paires opposées, puis deux autres poutres sont reliées pour former un carré qui constitue la structure de base de chaque module. Lorsqu'un nombre raisonnable de travées sont réalisées, les colonnes de l'étage supérieur sont érigées. Une fois la structure du rez-de-chaussée terminée, l'assemblage final de l'étage supérieur suit rapidement.

Un arbre planté dans le Crystal Palace.

Pour les vitres, Paxton a conçu des versions agrandies des machines qu'il avait conçues à l'origine pour le conservatoire de Chatsworth, en installant sur place des systèmes de production à la chaîne, alimentés par des machines à vapeur, qui concevaient les différentes pièces du bâtiment. Parmi elles se trouvent une machine qui rainurait mécaniquement le cadre en bois des fenêtres et une machine à peindre qui trempait automatiquement les pièces dans la peinture puis les faisait passer dans une série de brosses rotatives pour éliminer l'excédent.

Les derniers éléments majeurs à être mis en place sont les 16 structures semi-circulaires du transept arrondi, qui sont par ailleurs les seules pièces majeures en bois. Elles sont mises en place en une semaine. Grâce à la simplicité de la conception de Paxton et à l'efficacité combinée du constructeur et de ses fournisseurs, l'ensemble de la structure est assemblé avec une rapidité extraordinaire : une équipe de 80 hommes pouvait fixer plus de 18 000 vitres en une semaine[21]. Le bâtiment est achevé et prêt à recevoir l'exposition en seulement cinq mois[11].

D'après une étude menée par John Gardner de l'université Anglia Ruskin[24] publiée dans l'International Journal for the History of Engineering & Technology, la vitesse de construction est surtout due à l'usage pour la première fois d'écrous et de boulons qui inspirent par la suite la norme British Standard Whitworth (BSW)[25].

Des ormes qui poussaient dans le parc ont été déracinés puis replantés dans le hall d'exposition central, près d'une fontaine en cristal haute de 8 mètres. Paxton est acclamé dans le monde entier pour son œuvre et est élevé au rang de chevalier par la reine en reconnaissance de son travail. Le bâtiment final fait 563 mètres de long, 139 mètres de large et jusqu'à 41 mètres de haut ; il offre une surface d'exposition de 92 000 m2 et pèse 4 210 tonnes en prenant uniquement en compte la fonte et le verre[26].

Exposition universelle de 1851

La reine Victoria inaugurant l'Exposition universelle de 1851.

L'Exposition universelle de 1851 est inaugurée par la reine Victoria le 1er mai. Il s'agit de la première exposition culturelle et industrielle mondiale. Elle réunit près de 100 000 objets exposés sur une longueur de près de 16 km par plus de 15 000 exposants[27]. Le Royaume-Uni occupe la moitié de tous les présentoirs, montrant les richesses de son pays et de son empire colonial. La France est le deuxième plus grand exposant. Les expositions sont réparties en quatre thématiques principales : matières brutes, machinerie, industriels et beaux-arts. Parmi les objets exposés se trouvaient le diamant Koh-i-Nor, de la porcelaine de Sèvres, des orgues, une immense presse hydraulique et un camion de pompier.

Une image anaglyphique réalisée à partir d'un daguerréotype stéréoscopique au Crystal Palace en 1851.

La première semaine, le ticket d'entrée était fixé à 1 £ ; il est réduit à cinq shillings pour les trois semaines suivantes, un prix qui limitait tout de même l'entrée à la classe moyenne et aux aristocrates. Les classes laborieuses sont finalement invitées à voir l'exposition le 26 mai, lorsque le prix est réduit à un shilling (bien qu'il soit fixé à deux shillings et six pence les vendredis et à cinq shillings les samedis)[28]. Plus de six millions de visiteurs découvrent l'exposition, mais on ignore combien d'entre eux y sont passés plusieurs fois. L'évènement génère un bénéfice de 186 000 £ (environ 25 720 000 £ actuels)[29] qui est utilisé pour construire le Victoria and Albert Museum, le Science Museum et le Musée d'histoire naturelle à South Kensington.

Le Crystal Palace est le premier bâtiment à disposer dès sa construction de toilettes publiques[30], les « Chambres de retraite »[note 2] dans lesquelles l'ingénieur sanitaire George Jennings a installé ses toilettes à chasse d'eau[31] (initialement à destination des hommes, puis des femmes)[32]. Lors de l'exposition, 827 280 visiteurs ont payé chacun un penny pour pouvoir les utiliser. L'Exposition universelle ferme le 15 octobre 1851.

Pièce commémorative de l'Exposition universelle de 1851
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Face de la pièce commémorative.
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Pile de la pièce commémorative.

Démontage et reconstruction

Le Crystal Palace, photographie de 1854 par Philip Henry Delamotte.
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Médaille commémorative du déplacement.

L'exposition ne durant que six mois, le bâtiment devait originellement être démantelé. Cependant, et contre l'avis du Parlement britannique, il fut déplacé. La structure de fonte, fer à remplissage de verre plus bois fut démontée et reconstruite en 1853 avec ses modifications sur une propriété du nom de Penge Place, au sommet de Sydenham Hill. L'édifice fut alors agrandi. La structure principale avait une longueur de 565 m et l'ensemble, avec les deux tours châteaux-d'eau, avait une envergure de 623 m de long. Le transept principal central culminait à environ 60 m de haut (200 pieds) tandis que les deux châteaux d'eau atteignaient 90 m (300 pieds). Faute de moyens, cependant, la totalité du projet ne put être édifiée. La reine Victoria l'inaugura pour la seconde fois.

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Façade principale du Crystal Palace reconstruit à Sydenham en 1853.

Deux lignes de chemin de fer furent créées pour l'occasion, afin de desservir l'exposition permanente. La station inférieure sert toujours aujourd'hui. Il s'agit de la Crystal Palace railway station. Et une partie de la station supérieure, un métro qui donne accès à la promenade, est encore visible. Son toit est constitué de mosaïque italienne et c'est un bâtiment classé.

Un mythe, très populaire chez les écoliers du voisinage, laisse entendre que la station supérieure est fermée depuis qu'un train fut bloqué par l'effondrement d'un tunnel. En réalité, la fermeture est la conséquence programmée du déclin du trafic ferroviaire dans les années 1950.

Éléments aquatiques

Joseph Paxton était avant tout un jardinier et l'ordonnancement des jardins, fontaines, terrasses et autres cascades prouve sa dextérité. L'approvisionnement en eau était un problème majeur. Des milliers de litres étaient nécessaires pour faire fonctionner la myriade de fontaines et de cascades présentes dans le parc du Crystal Palace. Les deux jets les plus hauts atteignaient 76 m.

Des châteaux d'eau furent construits, mais le poids de l'eau dans les réservoirs les fit s'écrouler. Isambard Kingdom Brunel fut consulté et conçut le plan de deux énormes tours, une à l'extrémité nord, l'autre au sud de l'édifice. Chacune devait supporter une charge énorme d'eau provenant de réservoirs installés à chaque bout du parc.

Deux ans plus tard, les grandes fontaines et cascades furent inaugurées, une fois encore en présence de la reine, qui fut arrosée par un coup de vent qui répandit une brume d'eau sur le carrosse royal.

Attractions

L'intérieur du Crystal Palace en 1851.
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Statues d'iguanodon.

Des reproductions de dinosaures de taille réelle dessinés par Richard Owen, conçus et réalisés par Benjamin Waterhouse Hawkins faisaient partie des attractions. Ils étaient situés près des Lower lakes, à proximité de l'entrée Anerley[réf. nécessaire]. Ils sont toujours là aujourd'hui, bien que l'on sache désormais qu'ils sont anatomiquement inexacts. Un dîner pour vingt-quatre convives a pu être dressé sur l'une des statues d'Iguanodon pour la veille du nouvel an 1853[réf. nécessaire]. Les statues victoriennes ont été restaurées grâce à un budget de 4 000 000 £[réf. nécessaire]. Les résultats de ce travail ont été présentés au public par le duc d'Édimbourg en 2002[réf. nécessaire].

Les expositions comprenaient toutes les merveilles de l'ère victorienne, présentant la production de nombreux pays à travers le monde. Il y avait poteries et porcelaines, ferronneries et meubles, marteaux à vapeur et presses hydrauliques, parfums et pianos, maisons et scaphandres, armes à feu et baromètres, fabriques de vêtements et feux d'artifice. La reine Victoria adorait l'endroit et disait le trouver « enchanteur »[réf. nécessaire].

La plupart des finales de la coupe de football anglaise, dans les premières années de la compétition, ont été disputées dans le parc du Crystal Palace. La dernière fut celle de 1914, année où George V fut le premier roi à assister à une finale. Bien avant la création du Crystal Palace Football Club, une équipe portant le nom de Crystal Palace participait à la compétition. Les joueurs étaient tous employés de l'institution[réf. nécessaire].

Déclin

Action de la Crystal Palace Company en date du 5 juillet 1884

La popularité du Crystal Palace commence à décroître lorsque l'argent des caisses ne suffit plus à payer la maintenance. Cela est principalement dû au fait qu'une grande partie de la population n'a pas les moyens de se payer un ticket d'entrée. Une autre partie aurait volontiers visité le Palace, mais ne peut le faire puisque son seul jour de libre est le dimanche, jour où l'édifice est précisément fermé. Aucune protestation ne fait effet : la Lord's Day Observance Society, un groupe de pression qui protège le respect du dimanche comme jour du Seigneur soutient, tout comme elle le fait encore aujourd'hui, que les gens ne doivent pas être encouragés à travailler ou même à utiliser des moyens de transport le dimanche ; et que si les gens veulent vraiment visiter le Palace, alors leurs patrons doivent leur laisser un jour de libre en semaine, ce qui ne sera jamais le cas.

Lors de l'accession au trône de George V et de la reine Mary, on organise un festival. Deux ans plus tard, Robert George Windsor-Clive, 1er comte de Plymouth, achète l'ensemble et en fait don à la nation afin de le sauver de la pression immobilière. Durant la Grande Guerre, il sert de centre d'entraînement naval sous le nom de HMS Victory VI, aussi connu sous le nom de HMS Crystal Palace[33]. À la fin des hostilités, il est utilisé comme premier musée des guerres impériales. Sir Henry Buckland en devient le directeur général et améliore la situation financière. Beaucoup d'attractions sont remises en route, notamment les feux d'artifice du jeudi soir.

Destruction

Incendie.

Le 30 novembre 1936, le Palace est détruit en quelques heures par un incendie parti des toilettes, puis alimenté par le bois d'œuvre de l'édifice et attisé par un vent violent. Survenu en pleine nuit, le feu est visible à 10 kilomètres à la ronde. Tout comme en 1866, quand un incendie avait détruit le transept nord, le bâtiment n'est pas correctement assuré pour que l'ensemble des destructions soit couvert. Quoique 89 fourgons d'incendie et plus de 400 pompiers arrivent à la scène, ils ne peuvent pas l'éteindre.

Winston Churchill, de retour de la Chambre des communes, dit alors : « This is the end of an age » (« C’est la fin d’une époque »).

La tour sud est alors utilisée par John Logie Baird, pionnier dans le développement de la télévision, comme lieu d'expérimentation. Mais beaucoup de ses éléments de travail ont disparu dans l'incendie.

Seules les deux tours ont résisté aux flammes mais elles sont démantelées lors de la Seconde Guerre mondiale, car la Luftwaffe aurait pu s’en servir comme repère dans sa route vers Londres. La tour nord est dynamitée tandis que la tour sud est démontée brique par brique car elle est jugée trop proche des bâtiments voisins.

Après le Crystal Palace

Après la guerre, le site connaît des utilisations très diverses. Entre 1953 et 1973, un circuit de course de voitures y est installé et plusieurs courses y ont lieu, soutenues par le Conseil du Grand Londres.

La fondation Crystal Palace est créée en 1979 pour défendre la mémoire et le respect de ce lieu, symbole d’une période glorieuse de l’histoire anglaise. Son avenir est débattu ; différents plans ont été soutenus mais aucun n’a, à ce jour, été développé.

Le Crystal Palace Park abrite aujourd’hui le « Crystal Palace National Sports Centre ».

Édifices inspirés du Crystal Palace

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Håkan Svensson (Xauxa)
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Le Palais de Cristal de Madrid.

Le Crystal Palace a inspiré bien d’autres palais d’expositions de par le monde :

  • Crystal Palace de New York (1853-1858), éphémère construction au plancher de bois, qui brûla en 25 minutes. Voir : New York Crystal Palace .
  • Glaspalast de Munich (1853-1931), énorme palais d’expositions de 234 m de long, qui brûla, lui aussi, cinq ans avant son prédécesseur londonien.
  • l’Infomart de Dallas. Voir : (en) Infomart .
  • Coordonnées de l’emplacement du palais, au Crystal Palace Park de Sydenham : 51° 25′ 20″ N, 0° 04′ 33″ O
  • Une entreprise française du XIXe siècle de fabrication de plumes métalliques pour l’écriture, N. Letailleur, de Paris, a honoré le Palais de cristal, en produisant une plume avec l'image du bâtiment en relief.
  • Château de Ferrières : l'escalier d'honneur est une réplique de celui du Crystal Palace.

Dans les arts, la littérature et la culture

Le palais a toujours fait forte impression sur les visiteurs venus de toute l'Europe, au nombre desquels beaucoup d'écrivains. Très vite, il est devenu un symbole de la modernité, acclamé par certains et décrié par d'autres.

  • Valery Larbaud laissa un court texte décrivant ses impressions du Crystal Palace.
  • Dans Que faire ?, l'écrivain et philosophe russe Nikolaï Tchernychevsky imagine de transformer la société en un Crystal Palace par le biais d'une révolution socialiste.
  • Fiodor Dostoïevski répond implicitement à Tchernychevsky dans Les Carnets du sous-sol. Le narrateur pense que la nature humaine préférera la destruction et le chaos à l'harmonie symbolisée par le Crystal Palace.
  • En 1854, John Ruskin a consacré au Crystal Palace un pamphlet dans lequel il regrette que les Anglais se laissent impressionner par « quelques rangées de vitres » et laissent par ailleurs tomber en ruine leur patrimoine historique[34].
  • Camille Pissarro peignit le Crystal Palace en 1871[35].
  • Le Palace (ou une structure similaire) apparaît en 2004 dans l'anime Steamboy, ainsi que dans la série Eikoku Koi Monogatari Emma en 2005.
  • Le Crystal Palace sert de décor dans le livre Ptolemy's Gate.
  • L'écrivain italien Alessandro Baricco introduit le Crystal Palace dans son roman Châteaux de la colère mélangeant réalité et fiction.
  • Le philosophe allemand Peter Sloterdijk propose le Crystal Palace comme métaphore du projet européen.
  • Un épisode de l'anime Black Butler se déroule exclusivement au Crystal Palace.
  • Plusieurs scènes de l'anime Victorian Romance Emma se déroulent au Crystal Palace et présentent les différentes parties de l'exposition.
  • Diana Evans, dans son roman Ordinary people, fait référence tout au long du livre au Crystal palace et à sa destruction par les flammes pour décrire, imager et souligner la désagrégation du couple.

Notes et références

Notes

  1. En anglais : « palace of very crystal ».
  2. En anglais : « Retiring Rooms ».

Références

  1. « Crystal Palace », sur web.archive.org, (consulté le )
  2. (en) James Harrison, « Imperial Britain », dans Children's Encyclopedia of British History, Londres, Kingfisher Publications, (ISBN 0-7534-0299-8), p. 131
  3. (en) Tom Chance, « The Crystal Palace’s glass : A technical and social history » [PDF], sur tomchance.org,
  4. L'édition du 13 juillet 1850 du Punch incluait un article rédigé par Douglas William Jerrold, écrit sous le nom de plume Mrs Amelia Mouser. En réalité, le terme « Crystal Palace » est utilisé à sept reprises dans la même édition (pp. 3, 4, 154, 183 (deux fois), 214 (deux fois) et 224). Il semble clair, en revanche, que le terme était déjà utilisé par ailleurs et ne nécessitait pas une explication plus poussée. D'autres sources considèrent que l'édition du 2 novembre 1850 évoque pour la première fois cette appellation en raison de ses matériaux de conception. Le Punch s'était opposé aux côtés du Times à la proposition du comité d'organisation de l'exposition de construire un bâtiment en brique. Il parle en revanche beaucoup du Crystal Palace, à la fois avant et pendant l'exposition (par exemple dans l'article « Travels into the Interior of the Crystal Palace » de février 1851). On ignore comment le bâtiment était nommé par ses concepteurs. Source : Base de données des périodiques britanniques sur Web Archive.
  5. (en) Hermione Hobhouse, The Crystal Palace and the Great Exhibition of the Works of Industry of All Nations, Londres, Athlone, (ISBN 0-485-11575-1), p. 34 et 36 :

    « Il s'agissait essentiellement d'un bâtiment modulaire en fer, bois et verre, construit à partir de composants destinés à être recyclables. [...] Les pièces préfabriquées ont été construites dans les forges et scieries de la manufacture. »

  6. « The Great Exhibition of 1851 », sur web.archive.org, (consulté le )
  7. a b et c (en) Kate Colquhoun, A Thing in Disguise: The Visionary Life of Joseph Paxton, HarperCollins, , chap. 16
  8. (en) Henry-Russell Hitchcock, Architecture: Nineteenth and Twentieth Centuries, Harmondsworth, Penguin Books, (ISBN 0-14-056115-3), p. 184
  9. (en) Kate Colquhoun, A Thing in Disguise: The Visionary Life of Joseph Paxton, HarperCollins,
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  17. Charles-François Mathis (dir), Le Monde britannique (1815-1931), CNED/SEDES, 2009, p. 93.
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  33. London Borough of Bromley | Royal Naval Volunteer Reserve Memorial.
  34. The opening of the crystal palace, sur le site archive.org.
  35. Description du tableau sur le site de l'Art Institute de Chicago.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes