Mesfioua

Le plateau de Yaggour, dans le pays de Mesfioua

Mesfioua ou Messioua[1] (en tachelhit : Imssiwan ou Imsfiwan, littéralement « les rebelles ») est une tribu chleuhe du Haut Atlas central, installée dans la province d'Al Haouz au sud-est de Marrakech, au Maroc.

Connue pour sa forte tradition guerrière et son territoire escarpé difficile d'accès, la tribu des Mesfioua a longtemps été considérée comme imprenable. Membre de l’aristocratie almohade, regroupant les tribus masmoudiennes proches du pouvoir central, les Mesfioua ont joué un rôle important dans l'expansion almohade, notamment lors de la prise de Marrakech. Les Mesfioua se sont également distingués par leur insoumission tenace au Makhzen, accueillant des opposants politiques et prenant part à plusieurs soulèvements contre l’autorité centrale.

Territoire

La tribu des Mesfioua occupe une région de transition entre la plaine fertile du Haouz et les contreforts montagneux du Haut Atlas. Son territoire s'étend autour des localités de Tidili Mesfioua, Aït Ourir, Aghmat et Tighedouine. La région est délimitée par l’Oued Ourika à l’ouest, l’Oued Rdat à l’est, la forêt de Toufliht au nord et les premiers massifs de l'Atlas au sud.

« Le pays Mesfioua s’étend entre l’oued Ourika et l’oued Rdat ; c’est la partie la plus belle de la plaine de Marrakech, mais aussi la moins pacifiée, car les Mesfioua ont la tête près du bonnet, s’insurgeant facilement. »

— Georges Saintyves, 1922[2]

Communes actuelles

Tighedouine.

Étymologie

Les chroniqueurs différaient sur la signification du nom, son origine et sa prononciation amazighe correcte. Les historiens l'appelaient "Mesfioua", tandis que ses habitants se nomment "Msiwa" en arabe et "Imsiwen" en tamazight.

D'autres affirment qu'il est dérivé de "Imswan", ce qui signifie "les paysans", ou de "Imsufen", signifiant "les rebelles".

Il existe une narration moderne affirmant que le nom fait référence à l'élévation et à la puissance. Cette étymologie semble être la plus crédible du fait de la présence de la racine "Mass-", signifiant "seigneur", qu'on retrouve dans les noms de grandes tribus telles que les Masmouda qui est la confédération historique à laquelle appartiennent les Imsiwen.

Histoire

Origines

Les Mesfioua sont une branche de la confédération masmoudienne des Assaden, mentionnée par Ibn Khaldoun comme comprenant les factions des Doghagha et des Youtanan[4].

Aghmat

L’ancienne cité Aghmat, capitale des Masmouda et ancienne capitale de la principauté du même nom puis de l’empire almoravide, fait partie du pays des Messioua. Aghmat représente la principale ville et infernale les principaux pôles urbain, économique et religieux du sud du Maroc médiéval, jusqu’à la fondation de Marrakech qui la remplacera à partir du XIIe siècle. Aghmat est aujourd’hui le nom d’une commune, toujours peuplée de Messioua, situé à côté de l’ancienne cité qui est constitué aujourd'hui un site archéologique[5].

Epoque almohade

Sous les Almohades, les Mesfioua faisaient partie des Ahl Qabail, un groupe de huit tribus masmoudiennes dispersées dans le Haut Atlas, incluant les Hazradja, Hazmira, Haylana, N'fis, Ourika, Azzaden (dont les Mesfioua sont les seuls représentants actuels), Regraga et In Magus[6]. Ces tribus ont joué un rôle crucial dans l'établissement du mouvement almohade et ont participé à la prise de Marrakech en 1147 aux côtés d'autres tribus alliées.

Relations avec le Makhzen

Mesfioua se sont souvent opposés au Makhzen, notamment lors de la grande révolte de 1894, en alliance avec les Rehamna, qui mena au sac de Marrakech[7].

Leur réputation de tribu farouche, en particulier dans les zones montagneuses, perdure jusqu’à l’époque coloniale.

« Les Mesfioua sont des Chleuh et que les Chleuh soient des gens de la plaine ou des gens de la montagne, ils ont toujours le même caractère fier et indépendant. Les Mesfioua ont la tête près du bonnet, s'insurgeant facilement, surtout ceux de la montagne à peu près insoumis, et donnent du travail au pacha de Marrakech. Pour ne pas irriter ces populations très susceptibles ; la justice et la prudence s'opposent à ce qu'on les dépossède, et rien ne peut être fait chez elles qu'avec leur consentement et par association. »

— Georges Saintyves[2]

Notes et références

  1. Les Nouvelles de l'archéologie n° 135/mars 2014: Analyse des réseaux sociaux en archéologie, Les Éditions de la MSH, (ISBN 978-2-7351-1701-7, lire en ligne)
  2. a et b Georges Saintyves, « Au pays chleuh dans le Haut-Atlas », *Bulletin de la Société de géographie et d'études coloniales de Marseille*, t. 43, 1922, p. 20–21. Lire en ligne
  3. Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l’Afrique septentrionale, t. II, Imprimerie du Gouvernement, Alger, 1854, p. 160. Lire en ligne
  4. « Mission Archéologique d’Aghmat (MAA) : étude, conservation et valorisation de la capitale médiévale du Haouz / Site officiel de l'UMR Orient & Méditerranée (Paris) », sur www.orient-mediterranee.com (consulté le )
  5. Paul Pascon, مكاتبات شخصية ورسائل مخزنية حول الناحية الحوزية, Éd. Marocaines et Internat.,‎ (lire en ligne)
  6. Abderrazzak Essadiki, « Les Rehāmna depuis leur installation au Sahara jusqu'à 1862 », Antiquités africaines, vol. 37, no 1,‎ , p. 131–138 (DOI 10.3406/antaf.2001.1339, lire en ligne)

Liens externes