En géométrie , l'aire algébrique d'un polygone est une généralisation à un polygone quelconque de l'aire géométrique d'un polygone simple , mesure de la superficie de la région délimitée par ce polygone . Sa définition permet un calcul simple à l'aide de déterminants. Elle est équivalente à la formule de Green-Riemann donnant l'aire de la région déterminée par une courbe fermée simple.
Définition et propriétés
Dans le plan affine euclidien orienté, le déterminant d'un couple de vecteurs
(
u
→
,
v
→
)
{\displaystyle ({\vec {u}},{\vec {v}})}
ne dépend pas de la base orthonormée directe dans laquelle il est calculé et donne l'aire du parallélogramme construit sur
(
u
→
,
v
→
)
{\displaystyle ({\vec {u}},{\vec {v}})}
si
(
u
→
,
v
→
)
{\displaystyle ({\vec {u}},{\vec {v}})}
est direct, son opposé sinon.
On définit l'aire algébrique d'un triangle
A
B
C
{\displaystyle ABC}
quelconque par
Aire
(
A
B
C
)
=
A
B
C
¯
=
1
2
det
(
A
B
→
,
A
C
→
)
{\displaystyle {\text{Aire}}(ABC)={\overline {ABC}}={\frac {1}{2}}\det({\overrightarrow {AB}},{\overrightarrow {AC}})}
, donnant l'aire géométrique si
A
B
C
{\displaystyle ABC}
est parcouru dans le sens direct, son opposé sinon.
Étant donné un polygone quelconque
A
1
A
2
…
A
n
{\displaystyle A_{1}A_{2}\dots A_{n}}
on montre que l'expression
M
A
1
A
2
¯
+
M
A
2
A
3
¯
+
⋯
+
M
A
n
−
1
A
n
¯
+
M
A
n
A
1
¯
{\displaystyle {\overline {MA_{1}A_{2}}}+{\overline {MA_{2}A_{3}}}+\cdots +{\overline {MA_{n-1}A_{n}}}+{\overline {MA_{n}A_{1}}}}
ne dépend pas du point
M
{\displaystyle M}
choisi (car
M
A
B
¯
−
M
′
A
B
¯
=
1
2
det
(
M
M
′
→
,
A
B
→
)
{\displaystyle {\overline {MAB}}-{\overline {M'AB}}={\frac {1}{2}}\det({\overrightarrow {MM'}},{\overrightarrow {AB}})}
) et on la définit comme étant l'aire algébrique du polygone
A
1
A
2
…
A
n
{\displaystyle A_{1}A_{2}\dots A_{n}}
:
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
A
1
A
2
…
A
n
¯
=
M
A
1
A
2
¯
+
M
A
2
A
3
¯
+
⋯
+
M
A
n
−
1
A
n
¯
+
M
A
n
A
1
¯
{\displaystyle {\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})={\overline {A_{1}A_{2}\dots A_{n}}}={\overline {MA_{1}A_{2}}}+{\overline {MA_{2}A_{3}}}+\cdots +{\overline {MA_{n-1}A_{n}}}+{\overline {MA_{n}A_{1}}}}
[ 1] .
On montre que cette définition redonne bien la définition de l'aire algébrique d'un triangle si
n
=
3
{\displaystyle n=3}
, qu'elle reste inchangée par décalage circulaire sur les lettres
A
1
A
2
…
A
n
{\displaystyle A_{1}A_{2}\dots A_{n}}
, qu'on a la relation de type Chasles pour
1
⩽
p
⩽
n
{\displaystyle 1\leqslant p\leqslant n}
:
A
1
A
2
…
A
n
¯
=
A
1
A
2
…
A
p
¯
+
A
p
A
2
…
A
n
A
1
¯
{\displaystyle {\overline {A_{1}A_{2}\dots A_{n}}}={\overline {A_{1}A_{2}\dots A_{p}}}+{\overline {A_{p}A_{2}\dots A_{n}A_{1}}}}
(remarquer l'ajout de
A
1
{\displaystyle A_{1}}
à la fin),
et qu'elle donne bien l'aire géométrique dans le cas d'un polygone simple (c'est-à-dire sans aucune intersection d'aucune paire quelconque de côtés, en dehors du sommet commun à deux côtés successifs) parcouru dans le sens direct.
De plus l'ajout d'un point aligné avec deux sommets consécutifs ne change pas l'aire :
A
1
…
A
i
A
i
+
1
…
A
n
¯
=
A
1
…
A
i
X
A
i
+
1
…
A
n
¯
{\displaystyle {\overline {A_{1}\dots A_{i}A_{i+1}\dots A_{n}}}={\overline {A_{1}\dots A_{i}XA_{i+1}\dots A_{n}}}}
, formule pouvant être utilisée dans les deux sens.
Exemples
L'aire algébrique d'un quadrilatère croisé est égale à la différence des aires des deux triangles formés : dans la figure de gauche, on a
Aire
(
A
B
C
D
)
=
I
A
B
¯
+
I
B
C
¯
+
I
C
D
¯
+
I
D
A
¯
=
I
A
B
¯
−
I
D
C
¯
{\displaystyle {\begin{aligned}{\text{Aire}}(ABCD)\ &={\overline {IAB}}+{\overline {IBC}}+{\overline {ICD}}+{\overline {IDA}}\\&={\overline {IAB}}-{\overline {IDC}}\\\end{aligned}}}
).
Elle est donc nulle si ces deux triangles ont la même aire, par exemple pour un antiparallélogramme .
Pour un pentagone
A
B
C
D
E
{\displaystyle ABCDE}
, la relation ci-dessus donne :
Aire
(
A
B
C
D
E
)
=
A
B
C
¯
+
C
D
E
A
¯
=
A
B
C
¯
+
C
D
E
¯
+
E
A
C
¯
{\displaystyle {\text{Aire}}(ABCDE)={\overline {ABC}}+{\overline {CDEA}}={\overline {ABC}}+{\overline {CDE}}+{\overline {EAC}}}
.
Dans la figure de droite, par une autre méthode,
Aire
(
A
B
C
D
E
)
=
A
B
I
C
J
D
E
¯
=
A
B
I
¯
+
I
C
J
D
E
A
¯
=
A
B
I
¯
+
I
C
J
D
E
¯
=
⋯
=
A
B
I
¯
−
I
J
C
¯
+
J
D
E
¯
{\displaystyle {\text{Aire}}(ABCDE)={\overline {ABICJDE}}={\overline {ABI}}+{\overline {ICJDEA}}={\overline {ABI}}+{\overline {ICJDE}}=\cdots ={\overline {ABI}}-{\overline {IJC}}+{\overline {JDE}}}
.
Expression analytique
Les points
A
i
{\displaystyle A_{i}}
ayant pour coordonnées
(
x
i
,
y
i
)
{\displaystyle (x_{i},y_{i})}
dans une base orthonormée directe, l'aire algébrique se calcule par la formule :
2
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
|
x
1
x
2
y
1
y
2
|
+
|
x
2
x
3
y
2
y
3
|
+
⋯
+
|
x
n
x
1
y
n
y
1
|
{\displaystyle 2{\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})={\begin{vmatrix}x_{1}&x_{2}\\y_{1}&y_{2}\end{vmatrix}}+{\begin{vmatrix}x_{2}&x_{3}\\y_{2}&y_{3}\end{vmatrix}}+\cdots +{\begin{vmatrix}x_{n}&x_{1}\\y_{n}&y_{1}\end{vmatrix}}}
.
Vu la disposition des produits successifs effectués, cette formule est désignée en anglais par shoelace formula (formule des lacets de chaussure).
Exemple numérique
Pour l'aire du pentagone de sommets :
A
(
1
,
6
)
,
B
(
3
,
1
)
,
C
(
7
,
2
)
,
D
(
4
,
4
)
,
E
(
8
,
5
)
{\displaystyle A(1,6),B(3,1),C(7,2),D(4,4),E(8,5)}
On obtient
Aire
(
A
B
C
D
E
)
=
1
2
(
|
1
3
6
1
|
+
|
3
7
1
2
|
+
|
7
4
2
4
|
+
|
4
8
4
5
|
+
|
8
1
5
6
|
)
=
1
2
(
(
1
−
18
)
+
(
6
−
7
)
+
(
28
−
8
)
+
(
20
−
32
)
+
(
48
−
5
)
)
=
16
,
5
{\displaystyle {\begin{aligned}{\text{Aire}}(ABCDE)&={\frac {1}{2}}\left({\begin{vmatrix}1&3\\6&1\end{vmatrix}}+{\begin{vmatrix}3&7\\1&2\end{vmatrix}}+{\begin{vmatrix}7&4\\2&4\end{vmatrix}}+{\begin{vmatrix}4&8\\4&5\end{vmatrix}}+{\begin{vmatrix}8&1\\5&6\end{vmatrix}}\right)\\&={\frac {1}{2}}\left((1-18)\;+(6-7)\;+(28-8)\;+(20-32)\;+(48-5)\right)=16,5\\\end{aligned}}}
Posant
A
n
+
1
(
x
n
+
1
,
y
n
+
1
)
=
A
1
(
x
1
,
y
1
)
{\displaystyle A_{n+1}(x_{n+1},y_{n+1})=A_{1}(x_{1},y_{1})}
, on a
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
1
2
∑
i
=
1
n
(
x
i
y
i
+
1
−
x
i
+
1
y
i
)
{\displaystyle {\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})={\frac {1}{2}}\sum _{i=1}^{n}(x_{i}y_{i+1}-x_{i+1}y_{i})}
.
Or
x
i
y
i
+
1
−
x
i
+
1
y
i
=
−
(
y
i
+
y
i
+
1
)
(
x
i
+
1
−
x
i
)
+
x
i
+
1
y
i
+
1
−
x
i
y
i
{\displaystyle x_{i}y_{i+1}-x_{i+1}y_{i}=-(y_{i}+y_{i+1})(x_{i+1}-x_{i})+x_{i+1}y_{i+1}-x_{i}y_{i}}
; comme
∑
i
=
1
n
(
x
i
+
1
y
i
+
1
−
x
i
y
i
)
=
0
{\displaystyle \sum _{i=1}^{n}(x_{i+1}y_{i+1}-x_{i}y_{i})=0}
, on obtient
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
−
∑
i
=
1
n
y
i
+
1
+
y
i
2
(
x
i
+
1
−
x
i
)
{\displaystyle {\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})=-\sum _{i=1}^{n}{\frac {y_{i+1}+y_{i}}{2}}(x_{i+1}-x_{i})}
Or le terme dans la somme est l'aire du trapèze de sommets
(
x
i
,
0
)
,
(
x
i
+
1
,
0
)
,
(
x
i
+
1
,
y
i
+
1
)
,
(
x
i
,
y
i
)
{\displaystyle (x_{i},0),(x_{i+1},0),(x_{i+1},y_{i+1}),(x_{i},y_{i})}
et on retrouve
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
−
∫
A
1
…
A
n
y
d
x
{\displaystyle {\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})=-\int _{A_{1}\dots A_{n}}ydx}
,
formule de Green-Riemann .
De la même façon, on a :
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
∑
i
=
1
n
x
i
+
1
+
x
i
2
(
y
i
+
1
−
y
i
)
=
∫
A
1
…
A
n
x
d
y
{\displaystyle {\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})=\sum _{i=1}^{n}{\frac {x_{i+1}+x_{i}}{2}}(y_{i+1}-y_{i})=\int _{A_{1}\dots A_{n}}xdy}
.
On peut aussi écrire :
Aire
(
A
1
A
2
…
A
n
)
=
1
2
∑
i
=
1
n
y
i
(
x
i
−
1
−
x
i
+
1
)
=
1
2
(
y
1
(
x
n
−
x
2
)
+
y
2
(
x
1
−
x
3
)
+
⋯
+
y
n
(
x
n
−
1
−
x
1
)
)
{\displaystyle {\begin{aligned}{\text{Aire}}(A_{1}A_{2}\dots A_{n})&={\frac {1}{2}}\sum _{i=1}^{n}y_{i}(x_{i-1}-x_{i+1})\\&={\frac {1}{2}}{\Big (}y_{1}(x_{n}-x_{2})+y_{2}(x_{1}-x_{3})+\cdots +y_{n}(x_{n-1}-x_{1}){\Big )}\end{aligned}}}
Polygones réguliers
Pour un polygone régulier convexe à n côtés de longueur a , l'aire
S
{\displaystyle S}
est donnée par :
S
=
n
a
2
4
tan
(
π
/
n
)
.
{\displaystyle S={\frac {na^{2}}{4\tan(\pi /n)}}.}
Voir aussi
Notes et références
↑ « L'aire algébrique d'est quoi ? », sur les-mathematiques.net
Triangles
Quadrilatères
Par nombre de côtés
1 à 10 côtés
11 à 20 côtés
30 côtés et plus
Autres classements que par le nombre des côtés
Classement par convexité
Classement par les angles et les côtés
Classement par rapport à un cercle
Polygones réguliers étoilés
Description
Droites et cercles remarquables
Relations entre polygones
Construction
Dissection