Metta Sutta

Mettā Sutta (pali; « discours sur l'amour / l'amour bienveiillant ») est le titre utilisé pour deux sutra bouddhiques du Canon Pali, l'un et l'autre récités par les moines theravadin. Le premier — le plus souvent récité — s'intitule Karaṇīyamettā Sutta (« Discours sur les avantages de l'amour bienveillant »), ainsi intitulé d'après son incipit, Karaṇīyam : « (C'est cela) qui devrait être fait. » On le trouve dans le Sutta Nipāta (Sn 1.8) et le Khuddakapāṭha (Khp 9). Il compte dix versets et vante à la fois les qualités vertueuses et le développement méditatif de mettā (sanskrit: maitri), mot souvent traduit par « bienveillance, amitié »[1], ou « amour bienveillant ».

Cette idée de bienveillance inconditionnelle se retrouve dans la traduction en anglais de Thanissaro Bhikkhu par goodwil, mot rendu en français par « bienveillance[2] », mais qui véhicule en même temps l'idée de « bonne volonté »[2], ce qui souligne que la pratique est utilisée pour développer des comportements ou des gestes de bonne volonté envers tous les êtres.

L'autre sutra, appelé Mettānisamsa Sutta (« Discours sur les bienfaits de l'amour bienveillant »), énumère onze bienfaits que procure la pratique de mettā . Il se trouve dans l'Anguttara Nikaya (AN 11.15). Cet article porte sur le Karaṇīyamettā Sutta[Note 1].

Contexte

Place dans le canon

Dans le canon pali du bouddhisme Theravada, mettā est l'une des quatre « demeures divines » (pali : brahmavihāra) recommandées pour cultiver l'harmonie interpersonnelle et la concentration méditative (voir, par exemple, kammaṭṭhāna, « sujet de méditation »). Dans les œuvres canoniques ultérieures (comme le Cariyâpitaka , quinzième recueil du Khuddaka Nikâya), mettā est l'une des dix « perfections »(pāramī) qui favorisent la réalisation de l'éveil (bodhi) et constituent une condition préalable pour atteindre la bouddhéité.

Cadre narratif

Selon le commentaire post-canonique du Sutta Nipāta, qui donne le cadre narratif du Mettā Sutta, un groupe de moines se rendit dans la forêt durant la saison des pluies afin de méditer, ce qui dérangea les trois divinités de la forêt qui cherchèrent à les éloigner en leur faisant peur durant la nuit. Les moines vinrent trouver le Bouddha et lui demandèrent conseil. Celui-ci leur enseigna alors le Mettā Sutta, leur expliquant comment méditer sur l'amour bienveillant[3],[4]:

« Que tous les êtres soient en paix. / Que tous les êtres vivants, quels qu’ils soient — / Les faibles comme les forts, tous sans exception, / Les grands et les puissants, les moyens et les petits, / Visibles et invisibles, proches et lointains, nés et à naître — / Que tous les êtres soient en paix ! »

Les moines récitèrent le sutta et répandirent ces pensée de bienveillance à travers toute la forêt, ce qui apaisa les dévas de la terre.

Contenu

Le Mettā Sutta contient un certain nombre de contemplations ou de récitations qui favorisent le développement de mettā à travers des attitudes vertueuses et la méditation. Le discours identifie quinze qualités morales et conditions propices au développement de mettā. Il s'agit notamment de qualités telles que ne pas mentir (uju), être sincère (suju), être facile à corriger (suvaco), être doux (mudu) et être sans arrogance (anatimānī).

En termes de développement méditatif, le discours identifie un souhait intentionnel qui facilite la génération de mettā (pali : sukhino vā khemino hontu, « Que tous les êtres soient heureux et en sécurité ») ; ensuite, un moyen de développer des objets de méditation (une liste de tailles diverses, de proximité, etc.) autour d'un tel souhait; puis, une métaphore — l’amour protecteur d’une mère pour son enfant unique — afin d'illustrer la manière dont on devrait chérir ce thème de méditation et le garder dans son cœur[Note 2]; et enfin, une méthode pour diffuser mettā vers l'extérieur dans toutes les directions.

Utilisation

Ce discours est souvent récité dans le cadre des services religieux dans la tradition Theravada (et c'est même l'un des plus fréquemment récités[3]), mais il est également populaire dans la tradition Mahayana. Ainsi, il est régulièrement chanté par le sangha du Village des Pruniers (fondés par Thich Nhat Hanh), et il fait partie du recueil Chants du cœur, utilisé par le sangha pour les cérémonies[Note 3],[5].

Il a été rapporté que des moines bouddhistes ont chanté le Mettā Sutta dans le cadre de leur manifestation en septembre et octobre 2007 contre l'armée en Birmanie.

Références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Metta Sutta » (voir la liste des auteurs).

Notes

  1. On trouvera cependant une traduction en français et une en anglais du Mettānisamsa Sutta dans la rubrique « Liens externes ».
  2. Cela est souvent – en fait, presque universellement – interprété à tort, selon Thanissaro Bhikkhu, comme une métaphore prototypique du sentiment que nous devrions cultiver envers les autres ; car, ce n'est pas sa signification voulue. V. (en) Thanissaro Bhikkhu, « Metta Means Goodwill », accesstoinsight.org, 2011 [lire en ligne (page consultée le 4 mars 2025)]
  3. Selon cet ouvrage (Sully, 2009 (ISBN 978-2-354-32032-4) p. 24), le sutra est récité le lundi matin

Références

  1. Gérard Huet, « maitrī », sur sanskrit.inria.fr, Dictionnaire Héritage du sanscrit (consulté le )
  2. a et b Larousse, « goodwill », sur larousse.fr (consulté le )
  3. a et b (en) Robert E. Buswell Jr. et Donald S. Lopez Jr., The Princeton Dictionary of Buddhism, Princeton, Princeton University Press, 2014, xxxii + 1265 p. (ISBN 978-0-691-15786-3)p. 538-539
  4. « Mettā Sutta (Sutta Nipata, 1,8) », sur dhammadelaforet.org (consulté le )
  5. Village des Pruniers, « Soutra de l’Amour », (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Animitto, Vivre la bienveillance et l'amour. Méditations et paroles du Bouddha, Paris, Almora, , 233 p. (ISBN 978-2-351-18717-3)
  • (en) Rupert Gethin, The Foundations of Buddhism, Oxford, Oxford University Press, , 352 p. (ISBN 978-0-192-89223-2)
  • Peter Harvey, An Introduction to Buddhism. Teachings, History and Practices, Cambridge, Cambridge University Press, 2012 (2nd revised ed.), xxviii + 521 p. (ISBN 978-0-521-67674-8)
    Traduction en français: Le bouddhisme. Enseignements, histoire, pratiques, Seuil, coll. « Points Sagesses », 2016, 528 p. (ISBN 978-2-757-86294-0).
  • Kamalashila (Anthony Matthews), Meditation: The Buddhist Art of Tranquility and Insight, Birmingham, Windhorse Publications, 1996 [lire en ligne (page consultée le 10 mars 2025)]
  • Piyadassi Thera (ed., trans.), The Book of Protection: Paritta, Kandy, Buddhist Publication Society, 1999. [lire en ligne (page consultée le 10 mars 2025)]
  • T. W. Rhys Davids, & William Stede (Eds.), The Pali Text Society’s Pali–English Dictionary. Chipstead, Pali Text Society, 1921-1925 [lire en ligne (page consultée le 5 mars 2025)]
  • Sharon Salzberg (trad. Patricia Lavigne, préf. de Jon Kabat-Zinn ; Avant-propos de Matthieu Ricard), L'amour qui guérit [« Lovingkindness: The Revolutionary Art of Happiness (1995) »], Paris, Pocket, , 288 p. (ISBN 978-2-266-26523-2)
  • (en) A.K. Warder, Indian Buddhism, Delhi, Motilal Banarsidass, (1re éd. 1999 (3rd Revised Edition)), xviii + 601 p. (ISBN 8-120-81741-9, lire en ligne)

Anthologies

  • (en) Bhikkhu Bodhi, In the Buddha's Words. An Anthology of Discourses from the Pali Canon, Somerville (MA), Wisdom Publications, , 512 p. (ISBN 978-0-861-71491-9)
  • (en) Maurice Walshe, The Long Discourses of the Buddha: A Translation of the Dīgha Nikāya, Somerville (MA), Wisdom Publications, , 648 p. (lire en ligne)

Enseignement oral sur le sûtra

Articles connexes

Liens externes

Mettānisamsa Sutta

  • « Sutra sur les Bienfaits de la bienveillance » [lire en ligne (page consultée le 10 mars 2025)] / (en) The Benefits of Love [lire en ligne (page consultée le 10 mars 2025)]

Chant et récitation