Après l'armistice de 1940, des artistes juifs, antifascistes ou réfractaires subversifs viennent se réfugier au vieil Oppède[4]. Il s'agit d'un petit groupe d'étudiants en architecture et en peinture des Beaux-Arts, installé dans le moulin à huile et le prieuré semi-ruinés, dans la partie haute et presque inhabitée du vieux village d’Oppède, appartenant au photographe Alexey Brodovitch, et animé par Bernard Zehrfuss qui jouit de l'aura de son premier grand prix de Rome. Il organise un réseau de résistance tout en continuant à faire des projets concrets d'architecture[5]. Le groupe d'artistes publie en août le « Manifeste du Groupe d’Oppède » et s’engage dans la réhabilitation de plusieurs bâtiments en ruine du vieil Oppède dont le prieuré et alentour comme à Bonnieux ou plus loin encore avec leurs confrères installés à Marseille et menés par Eugène Beaudouin[5],[6]. Les architectes Zehrfuss, Jean Auproux[7], Georges Brodovitch[8] et Florent Margaritis[9] seront surnommés « les quatre barons d’Oppède »[5].
Arrivé à Alger, il est envoyé à Tunis et devient directeur du service d'architecture de la direction des travaux publics du protectorat de 1943 à 1948. Il exerce par ailleurs à Alger où il construit des logements collectifs, jusqu'en 1953.
Architecte des bâtiments civils et des palais nationaux en 1956, il est inspecteur général de 1965 à 1968[11]. Il réalise un certain nombre de programmes prestigieux tels que le Palais de l'Unesco ou le Cnit, il construit également le musée Gallo Romain sur les pentes de Fourvière à Lyon. Cependant, ses deux projets d'aménagement du nouveau secteur de la Défense en 1958 et 1960 sont abandonnés en 1971. Il a également construit de nombreux bâtiments d'habitat social, notamment du Haut-du-Lièvre qui surplombent Nancy.
L'utilisation exclusive du béton et du chemin de grue ainsi que le choix architectural minimaliste concentrent les critiques dans des immeubles qui se sont souvent très vite dégradés, en particulier les immeubles d'habitation. Les critiques les plus fortes se sont portées sur Clichy-sous-Bois-Montfermeil et le Haut-du-Lièvre, qualifié d'« énorme bévue »[20].
Bernard Zehrfuss a vaguement reconnu en partie le bien-fondé de ces critiques :
« Lorsque le programme du Haut-du-Lièvre a été lancé, je pensais qu’il était possible de faire sur ce site magnifique autre chose qu’une banlieue. [...] Le parti-pris est peut-être discutable, je crois cependant qu’il était valable, parce qu’il affirmait la grandeur du site. Les immeubles sont bien orientés. À l’époque, on cherchait surtout à réduire les coûts ».
↑« C’est le cas par exemple en 1941 pour la restauration et la décoration d’une maison ancienne à Bonnieux. Le propriétaire, un dentiste de Hyères, laisse aux artistes toute latitude quant au choix du thème. Bernard Zehrfuss précise qu’ils doivent travailler plus spécifiquement sur le «décor, [l’] intérieur, [les] plans, [la] cheminée, [les] fresques»», cité in« L’EDEN BAR DE MARSEILLE OU LA VIE DIFFICILE D’ARTISTES ÉXILÉS EN PROVENCE SOUS L’OCCUPATION » par Sabrina Dubbeld - Provence historique, Fascicule 242 – 2010.
↑Charlotte Jelidi, La villa zehrfussienne de Bourguiba (1954-1956), Le Carnet de l'IRMC, (lire en ligne).
↑Voir la fiche d'inventaire sur le site de l'Atlas du patrimoine de Seine-Saint-Denis
↑Voir l'article « Une ambassade contemporaine pétrie d'histoire(s) » sur le « site »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ) CyberArchi.com.
↑« La tour Super-Montparnasse », sur paris-promeneurs.com via Wikiwix (consulté le ).
Bernard Zehrfuss, De l'architecture, Des villes, Institut de France, 1994-1995
François Chaslin, « Bernard Zehrfuss », Dictionnaire des architectes, éd. Encyclopaedia Universalis - Albin Michel, 1999, p. 742-744
Christine Desmoulin, Bernard Zehrfuss (1911-1996) : itinéraire d'un architecte, mémoire de DEA d'histoire socio-culturelle, dir. François Loyer, université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, 2001
Christine Desmoulins, Bernard Zehrfuss, un architecte français (1911-1996). Une figure des Trente Glorieuses, thèse de doctorat, dir. François Loyer, spécialité : histoire de l'architecture, Laboratoire : LADRHAUS, École nationale supérieure d'architecture de Versailles, 2008.
Christine Desmoulins, Bernard Zehrfuss, éd. Infolio - éditions du Patrimoine, coll. « Carnets d'architectes », 2008, 192 p. (ISBN 978-2-88474-134-7).