Analyse morphogestuelle
L'analyse morphogestuelle (A.M.G.) est une méthode d'exploration de la personnalité fondée sur l'analyse de ses aspects corporels expressifs et évolutifs, à partir des différents champs possibles de leur visualisation. Mise au point par le français Jean-Pierre Veyrat en 1983, cette technique de décryptage et d'interprétation du comportement observable part du principe que le corps possède tout un langage morphogestuel. Particulièrement riche, il s'exprime tout le temps à travers tout notre comportement, mais bien souvent sans s'en rendre compte, ni en imaginer l'étendue. En saisir le sens, c'est partir de la face connue et directement observable d'une personnalité pour accéder à sa face cachée et pouvoir ainsi apprécier, comprendre et anticiper bon nombre de ses réactions. Ainsi, en analyse morphogestuelle, pour dresser le portrait psychologique d'un individu doivent être pris en compte ses attitudes, ses gestes, ses mimiques, aussi bien que ses rides.
Principe
L'analyse morphogestuelle est la première approche[citation nécessaire] du comportement observable à associer les deux dimensions corporelles majeures que sont : la gestuelle, composée des postures, des gestes et des mimiques et la métamorphologie, liée aux transformations corporelles au fil des ans et des circonstances. Avec une place toute particulière accordée au visage considéré comme une zone privilégiée d'observation pour son extraordinaire concentration de moyens d'expression ainsi que pour ses étonnantes possibilités d'évolutions.
Démarche
Observer est difficile. Entre le regard, les mimiques, les gestes, les attitudes…beaucoup s'y perdent. Comment s'y retrouver ? Qu'est-ce qui est vrai ? Qu'est-ce qu'on peut en retirer ? Est ce vraiment sérieux ? Comment l'appliquer dans ses rapports quotidiens ? sont des questions récurrentes.
Cette approche morphogestuelle offre aujourd'hui un cadre théorique validé, propose une pratique éprouvée et répond à des objectifs multiples touchant la vie quotidienne. Son expertise la plus sollicitée porte sur l'écart entre l'intention prêtée à une personne et l'observé de son comportement dans un contexte donné. Mais, quoique déjà très riche d'enseignement, sa contribution dépasse largement le cadre restreint de la gestuelle de situation. Ce qui en fait tout son intérêt. Les évolutions morphologiques[1] et expressives comptent au moins autant, car donnant accès à l'appréciation d'aspects durables de la personnalité, à ce que l'on appelle sa « signature corporelle ». Et, ce, à travers des signes observables caractéristiques et symptomatiques d'un caractère, liés au vécu de chacun comme le retentissement d'évènements majeurs, le type de registre émotionnel dans sa relation aux autres ou le degré d'estime de soi.
Complexité et limites du langage morphogestuel
[2]Alors que dans une conversation on peut, à tout moment, faire répéter un mot ou une phrase qu'on n'a pas compris, la spécificité unique du langage morphogestuel tient au fait qu'une telle éventualité n'est pas possible. Sauf dans le cas d'un enregistrement filmé, toute attitude, tout geste, toute mimique qui ont échappé, ne serait-ce qu'un instant, à l'attention de l'observateur sont irrémédiablement perdus. Et nul ne peut être dans une hyper-vigilance de tous les instants.
Il est fait également le procès récurrent que, selon le pays où on se trouve, certains gestes n'ont pas le même sens et, donc, que leur pertinence serait contestable. Un reproche similaire pourrait aisément être fait au langage parlé dont on sait le nombre d'interprétations diverses et de faux-amis qu'il contient, sans que personne n'y trouve à redire. Le langage du corps ressemble à n'importe quel autre langage : il a son alphabet, ses mots, ses phrases... Et, surtout, il est, pour chacun, issu d'une culture qui demanderait, lorsqu'elle diffère de la nôtre, de requérir un « traducteur gestuel » local pour en décrypter toutes les subtilités. Aussi, tant que l'on acceptera pas le principe qu'il existe autant de « langues gestuelles » qu'il existe de langues orales, que son apprentissage requiert de s'y pencher avec une même patience et une même volonté de compréhension, la prise en compte de la dimension morphogestuelle comme facteur objectif d'analyse du comportement restera purement anecdotique.
Les applications
Sur le plan professionnel, l'analyse morphogestuelle couvre un spectre très complet et très ouvert. À ce jour, elle a ouvert des champs d'application dans tous les domaines où l'appréciation d'une gestuelle ou d'un profil morphogestuel apportent un plus dans le décryptage de scènes filmées et dans l'analyse de séquences télévisuelles. Elle utilisée dans le suivi d'un échange, l'évaluation de la crédibilité et du mensonge[3], la détection et l'accompagnement d'un comportement en crise… Elle connaît également d'importantes applications en négociation où elle a obtenu l'approbation de nombreux négociateurs de haut niveau pour son réel apport dans l'observation active du non-dit dans l'appréciation des relations avec la partie adverse et des jeux de tension présents
Mise en garde
L'analyse morphogestuelle ne prétend pas être une science, son objet est la présentation d'un cadre méthodologique permettant la collecte d'un maximum d'indices corporels susceptibles d'être signifiants de la manière d'être et de la communication d'une personne, puis de proposer, autant que possible, des interprétations qui tiennent compte de l'extrême complexité de la raison de tel ou tel mouvement, ou de tel ou tel changement physique, en fonction du contexte du moment.
Elle rejette tout lien avec la morphopsychologie. Elle en condamne totalement les théories sur les correspondances entre les formes ainsi que sur les prétendus étages du visage avec des traits de caractère. De même pour la synergologie et sa cartographie des mouvements corporels censés traduire des discordances entre la pensée et le comportement, avec des arguments pour le moins contestables, selon lesquels à une zone précise du cerveau correspondrait une zone tout aussi précise du langage du corps.
Notes et références
- ↑ Danièle DIZIN, « Ces rides qui nous racontent », Psychologie Magazine, no 128,
- ↑ Michel Bénézech, « Vérité et mensonge ; l'évaluation de la crédibilité en psychiatrie légale et en pratique judiciaire », Annales medico-psychologiques, no Vol 165, n°5, p.351-364,
- ↑ Michel Benezech, « VERITE ET MENSONGE : l'évaluation de la crédibilité en psychiatrie légale et en pratique judiciaire », Annales médico psychologiques, no Vol.165, n°5, p.351-364,
Voir aussi
Bibliographie
- Frédéric Peucheret, 2014. Du mensonge à l'aveu "". AENTYS Éditions
- Michel Bénézech - Innocence et Culpabilité. Annales Médico-psychologiques 171 (2013) 499-501
- Jean-Pierre Veyrat, 2012. Atlas psychologique du visage. Éditions Negorisk
- Marie-Laure Brunel-Dupin, Pierre Chaignon 2009. L'analyse comportementale outil d'aide à l'enquête. Revue de la Gendarmerie Nationale N°231
- Roger Axtell, 1997 . Le pouvoir des gestes. Interéditions
- Michel St-Yves, Jacques Landry 2004. Psychologie des entrevues d'enquête. Éditions Yvon Blais
- Jean-Pierre Veyrat, 2002. Aperçus du langage corporel. Éditions Negorisk
- Desmond Morris, 1979. La clé des gestes. Éditions Grasset
Article connexe
Liens externes
- (fr) Interview filmée de Jean-Pierre Veyrat sur le langage corporel
- (fr) Interview filmée de Jean-Pierre Veyrat, présentation de l'AMG
- (fr) Quel est l'impact du comportement non verbal de l'inspecteur de police sur l'audition des mineurs ? Elodie Dal Sasso, licenciée en criminologie
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