Arétalogie
Une arétalogie (du grec ἀρεταλογία, lui-même issu de ἀρετή, arété, « vertu », et de λόγος, logos, « discours ») est un genre littéraire qui exalte les mérites et les miracles d'un dieu ou d'une divinité, aussi bien dans l'Égypte antique que dans la civilisation gréco-romaine. Souvent rédigées sous une forme poétique (hymnes, litanies...), les arétalogies sont généralement écrites à la première personne.
Présentation
Pour Marie-Françoise Baslez, l'arétalogie est un texte liturgique qui « se définit par la combinaison d'un récit circonstancié et d'une présentation de la puissance (arété) du dieu »[1]. Il s'agit d'une variante religieuse de la rhétorique classique, d'une « expression littéraire née dans les sanctuaires guérisseurs du monde grec comme celui d’Épidaure ; c’est un hymne ou un récit à la gloire du dieu et de ses vertus (aretai), au sens le plus efficace du terme, notamment de ses miracles » [2]. Ainsi, dans la Grèce antique, « l'apparition de la divinité se manifeste en réponse à la prière du fidèle inquiet »[3].
L'auteur de ce type de récit, l'« arétalogue » ou « arétologue » (ἀρετολόγος), faisait partie des « orateurs mystiques du paganisme, qui récrivaient l'histoire du monde et de leur propre vie pour la plus grande gloire de leur dieu »[4]. Il officiait dans les temples, où il pouvait avoir des fonctions de divination et d'interprétation des songes[5].
Les arétalogies les plus tardives datent du IIe siècle de notre ère[6].
Les arétalogies d'Isis
Dans le monde gréco-égyptien de la dynastie lagide, le culte d'Isis a inspiré plusieurs arétalogies[7], dont un texte du IIIe siècle avant notre ère découvert en 1925 à Cymé qui énumère les nombreux pouvoirs de la déesse[8]. Il commence par ces vers :
Démétrios, fils d'Artémidôros,
appelé aussi Thraséas, de Magnésie sur le Méandre, adresse une prière à Isis. [...]
Moi, je suis Isis, la souveraine de toute contrée,
j'ai été instruite par Hermès
et j'ai inventé l'écriture avec Hermès.
Contenu éthique
Dans la tradition chrétienne, le terme « arétalogie » acquiert un sens dérivé, selon une acception morale qui l'assimile à l'éthique individuelle. L'Encyclopédie de Diderot définit l'arétalogie comme « la partie de la philosophie morale qui traite de la vertu, de sa nature et des moyens d'y parvenir »[9]. Elle peut alors être considérée comme la « science de former la vie (mœurs, actions) selon les vertus, ce qui conduit l'homme à la félicité naturelle »[10].
Notes et références
- ↑ Marie-Françoise Baslez, Saint Paul, artisan d'un monde chrétien, Pluriel/Fayard, 2008 (ISBN 978-2-8185-0263-1), p. 356.
- ↑ Marie-Françoise Baslez, Les Persécutions dans l’Antiquité. Victimes, héros, martyrs, Fayard, 2007.
- ↑ Marie-Françoise Baslez, Saint Paul, artisan d'un monde chrétien, Pluriel/Fayard, 2008 (ISBN 978-2-8185-0263-1), p. 86.
- ↑ Marie-Françoise Baslez, Saint Paul, artisan d'un monde chrétien, Pluriel/Fayard, 2008 (ISBN 978-2-8185-0263-1), p. 165.
- ↑ Christopher Walter, The Warrior Saints in Byzantine Art and Tradition, Ashgate, 2003, p. 17.
- ↑ Édouard des Places, sj, « La prière cultuelle dans la Grèce ancienne », Revue des sciences religieuses, 1959, 33-4 p. 343-359.
- ↑ André-Jean Festugière, op, « À propos des arétalogies d'Isis », Harvard Theological Review, 1949, Cambridge University Press.
- ↑ Laurent Bricault, Les Cultes isiaques dans le monde gréco-romain, Paris, , 575 p. (ISBN 978-2-251-33969-6), p. 75-77.
- ↑ « Arétologie », Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers sur Wikisource.
- ↑ Roman Darowski, sj, La Philosophie des Jésuites en Pologne du XVIe siècle au XVIIIe siècle : essai de synthèse, Cracovie, 1997.
Bibliographie
- Laurent Bricault, Les Cultes isiaques dans le monde gréco-romain, Les Belles Lettres, coll. « La Roue à livres/Documents », 2013 (ISBN 978-2-251-33969-6)
- Yves Grandjean, Une nouvelle arétalogie d'Isis à Maronée (Études préliminaires aux religions orientales dans l'Empire romain, t. XLIX), Leyde, Brill, 1975, Compte rendu en ligne, par Robert Turcan, Revue des études anciennes, 1976, 78-79-1-4, p. 240-242
- Vincenzo Longo, Aretalogie nel mondo greco. Epigrafi e papiri, Pubblicazioni dell' Istituto di Filologia classica dell'Universita di Genova, 1969, 187 p.
- Laurent Pernot, La Rhétorique de l’éloge dans le monde gréco-romain, Paris, Institut des études augustiniennes, 1993
- Robert Turcan, Les Cultes orientaux dans le monde romain, Les Belles Lettres, coll. « Histoire », 1992 (ISBN 2-251-38001-9)
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Otto Crusius, « Aretalogoi », 1895