Adelophthalmidae
Règne | Animalia |
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Embranchement | Arthropoda |
Sous-embr. | Chelicerata |
Ordre | † Eurypterida |
Sous-ordre | † Eurypterina |
Infra-ordre | † Diploperculata |
Super-famille | † Adelophtalmoidea |
Genres de rang inférieur
- † Adelophtalmus Meek et Worthen, 1868
- † Bassipterus
- † Eysyslopterus Tetlie et Poschmann, 2008
- † Nanahughmilleria Kjellesvig-Waering, 1961
- † Parahughmilleria Kjellesvig-Waering, 1961
- † Pittsfordipterus
- † Pruemopterus Poschmann, 2021
Adelophthalmidae (nom dérivé du genre type Adelophthalmus, qui signifie « sans yeux évidents ») est une famille d'euryptérides, un groupe éteint d'arthropodes aquatiques. Les Adelophthalmidae sont la seule famille classée comme faisant partie de la superfamille des Adelophthalmoidea, qui à son tour est classée dans l'infra-ordre des Diploperculata dans le sous-ordre des Eurypterina.
Les euryptérides adélophalmidés sont de petits euryptérides nageurs apparus au Silurien. Avec les premiers membres connus du groupe, Nanahughmilleria prominens et Parahughmilleria maria, découverts dans des gisements du Silurien inférieur (possiblement de la série du Llandovery), et les derniers membres, appartenant au genre durable et très répandu Adelophthalmus, qui ont disparu au Permien inférieur, les Adelophthalmidae constituent la famille d'euryptérides qui vécu le plus longtemps. La survie du groupe, et des eurypteridés nageurs (sous-ordre des Eurypterina), au-delà du Dévonien supérieur est entièrement due à la survie et au succès ultérieur d'Adelophthalmus tout au long du Dévonien et du Carbonifère. Adelophthalmus (et peut-être également Unionopterus) représente le seul genre connu d'euryptérides nageurs au-delà de l'extinction du reste du groupe au Dévonien supérieur, étendant l'aire de répartition temporelle du groupe de plus de cent millions d'années.
Bien qu'ils aient été les derniers euryptérides nageurs et les derniers membres du sous-ordre plus prospère et plus nombreux des Eurypterina, les Adelophtalmidae ne sont pas les derniers Euryptérides. Les Stylonurines ou « euryptérides marcheurs » ont été les derniers survivants de la famille des Hibbertopteridae, quelques millions d'années après l'extinction des Adelophtalmidae au début du Permien, et jusqu'à l'extinction du Permien-Trias ou peu avant.
Description

La taille des Euryptérides adelophtalmidés varie de 4 centimètres (1,6 pouce) à 32 cm (12,6 pouces)[1]. La plus petite espèce est Nanahughmilleria clarkei et la plus grande Adelophthalmus khakassicus. Les Adélophtalmidae sont relativement petits par rapport aux autres Euryptérides, comme le gigantesque Ptérygotide Jaekelopterus rhenaniae, qui dépasse facilement 2 mètres (6,5 pieds) et est le plus grand arthropode connu[2].
Les Adelophtalmidae sont de petits Euryptérides nageurs caractérisés par une carapace parabolique (la plaque dorsale de la tête approximativement en forme de U, Unionopterus représentant peut-être une exception) et des yeux intramarginaux (positionnés dans la marge). La palette natatoire (sixième membre ) est de type Adelophthalmus, c'est-à-dire avec un septième podomère (segment des membres) long et un huitième podomère grossièrement dentelé. Le corps présente une différenciation de deuxième ordre au niveau de la section médiane (c'est-à-dire avec des « extensions » latérales dans le septième segment du corps) et un telson (division la plus postérieure du corps) lancéolé (en forme de lance)[3],[4].
La morphologie du groupe varie en fonction du degré de dérivation (stade d'évolution avancée) du genre. En fait, depuis le Nanahughmilleria basal (« primitif ») jusqu'au Adelophthalmus plus dérivé, on a observé une diminution progressive de la spinosité (possédant des épines) des appendices (membres) et une augmentation de la taille des spatules génitales (une longue pièce plate dans la région génitale). Le Pittsfordipterus, encore plus primitif, ne possédait probablement même pas ce dernier[3].
Histoire de la recherche

Les premiers fossiles d'Adélophtalmides qui ont été découverts sont ceux du genre type Adelophthalmus. Le paléontologue allemand Hermann Jordan a collecté le premier spécimen de l'espèce A. granosus à Jägersfreude dans la Sarre, en Allemagne. Le spécimen est décrit trois ans plus tard par Jordan et Hermann von Meyer, qui reconnaissent immédiatement la nature eurypteride des fossiles du fait de la grande ressemblance entre la forme générale du spécimen, de sa carapace et de ses appendices, et celle d'Eurypterus. L'une des principales différences que Jordan et von Meyer remarquent est l'absence apparente d'yeux, qui donne son nom à Adelophthalmus (qui signifie « sans yeux évidents »[5] ) et à toute la superfamille. On pense aujourd'hui que cette caractéristique du premier spécimen collecté est due à un artefact de conservation et qu'elle n'est pas caractéristique d'Adelophthalmus, ni d'aucun autre adélophtalmide[6]. Depuis, 33 espèces[7],[8],[1],[9] ont été décrites, dont certaines ont été tout d'abord classées dans d'autres genres (Anthraconectes, Glyptoscorpius, Lepidoderma et Polyzosternites, tous désormais synonymes d'Adelophthalmus )[6] ce qui fait d'Adelophthalmus le genre d'euryptéride le plus diversifié à ce jour[7]. Cependant, bon nombre de ces espèces sont fragmentaires et pourraient représenter des synonymes d'autres espèces au sein d'Adelophthalmus ou même d'espèces d'autres genres[10]. Il est possible que la grande quantité d'espèces rattachées au genre Adelophthalmus provoque finalement sa division en deux ou trois genres distincts[11].
En 1948, le paléontologue et géologue ukrainien Boris Isidorovich Chernyshev décrit un nouveau genre connu par un seul spécimen du Kazakhstan (qui, à l'époque, fait partie de l'Union soviétique ) et le classe provisoirement dans la famille des Pterygotidae[12]. Le genre est nommé Unionopterus. Sa classification est controversée en raison de la mauvaise qualité des illustrations fournies par Chernyshev et du fait que le seul fossile connu est présumé perdu. Le genre est traité comme un Euryptéride indéterminé, un Adélophtalmide, un membre du genre Adelophthalmus, ou encore parfois complètement ignoré. La spinosité de ses appendices pourrait suggérer la deuxième option, mais ce n'est pas certain et la classification phylogénétique d'Unionopterus pourrait n'être jamais résolue[3].
En 1961, le paléontologue américain Erik Norman Kjellesvig-Waering considèrant que plusieurs espèces du genre Hughmilleria sont suffisamment différentes de l'espèce type pour être séparées en un nouveau sous-genre, crée et nomme ce sous-genre Nanahughmilleria. Ces espèces partagent une caractéristique clé, de petits yeux réniformes (soit en forme de haricot) et intramarginaux, ce qui contraste avec les grands yeux ovoïdes positionnés au bord de la carapace présents dans le génotype et ses formes alliées. Kjellesvig-Waering désigne H. (Nanahughmilleria) norvegica comme espèce type du nouveau sous-genre. Au même moment, il érige un nouveau genre, Parahughmilleria, avec P. salteri comme espèce type. Pour différencier ce nouveau clade, Kjellesvig-Waering se base principalement sur la présence de lobes supplémentaires (lobes distaux dans un segment en forme de plaque qui contient l'ouverture génitale appelée opercule génital), ainsi sur la présence d'yeux intramarginaux[13].

En 1964, Kjellesvig-Waering décrit l'opercule génital de l'espèce H. (N.) phelpsae et suggère que cette partie du corps puisse avoir une grande importance phylogénétique à l'avenir[14]. Deux ans plus tard, en collaboration avec le paléontologue américain Kenneth Edward Caster, il élève H. (N.) phelpsae au niveau générique sous le nom de Pittsfordipterus. Les deux scientifiques décrivent également un nouveau genre et une nouvelle espèce, Bassipterus virginicus. Ce nouveau taxon se distingue essentiellement des autres Adélophtalmides par la spécialisation de son appendice génital, avec des caractéristiques qui rappellent celles d'Eurypterus[15].
En 1989, Victor P. Tollerton, Jr. décrit la famille Adelophthalmidae ainsi que de nombreux autres taxons, dont Adelophthalmus, Parahughmilleria, Bassipterus et Unionopterus. Ce clade est caractérisé par la présence d'épines sur les deuxième à cinquième paires d'appendices, d'une palette natatoire de type Adelophthalmus et d'épimères (« extensions » latérales du segment) sur le septième segment. Tollerton fait remarquer que certaines espèces d'Adelophthalmus qui ne possèdent pas d'épines sur les appendices seraient vraissemblablement mieux classées dans un nouveau genre de la famille Slimonidae (il mentionne alors Slimonioidea, taxon désormais invalide)[16]. Bien que placer ces espèces sans épines dans un nouveau genre puisse être soutenu phylogénétiquement, les déplacer vers Slimonidae en se basant sur l'absence d'un unique caractère qui semble avoir été perdu indépendamment dans les deux groupes n'est pas conforme aux pratiques reconnues de classification[3].
Odd Erik Tetlie, dans une thèse inédite de 2004, postule l'existence de la superfamille des Adelophthalmoidea et de la famille des Nanahughmilleridae. Les Adelophthalmoidea y sont décrits comme des Euryptérides dotés notamment d'une carapace parabolique, de petits yeux réniformes, d'appendices à la spinosité variable et d'un telson lancéolé. Cette superfamille sera officiellement décrite deux ans plus tard par Tetlie et Peter Van Roy[3]. La famille Nanahughmilleridae est décrite dans cette thèse comme contenant les Adélophtalmoïdes dépourvus de spatules génitales ou pourvus de spatules réduites, et dont les deuxième à cinquième paires d'appendices prosomaux (de prosoma, « tête ») sont de type Hughmilleria . Telle que décrite, cette famille comprend Nanahughmileria, Pittsfordipterus et possiblement Parahughmilleria[17]. Toutefois, cette famille n'a presque jamais été utilisé dans les études et listes ultérieures d'Euryptérides[3]. A la place, les Nanahughmillérides sont classés parmi les Adelophthalmidae[7].
En 2008, Nanahughmilleria patteni est reconnue comme espèce distincte et beaucoup plus basale, ce qui conduit Tetlie et Markus Poschmann à nommer un nouveau genre pour accueillir cette espèce, Eysyslopterus. Les carapaces d'Eysyslopterus et d'autres membres basaux des Pterygotioidea (Herefordopterus) et des Waeringopteroidés (Orcanopterus), étroitement apparentés, apparaissent très semblables, ne différant que par la position des yeux. Du fait de la position intramarginale des yeux, Eysyslopterus a été classé parmi les Adelophthalmidae. Mais certains auteurs suggèrent qu'il s'agit en fait du taxon frère (plus proche parent) d'un clade formé par Adelophthalmoidea et Pterygotioidea. Seule la découverte de davantage de matériel fossile permettra, le cas échéant, de démontrer cette hypohèse[10].
En 2023, Archopterus anjiensis, un nouveau genre et une nouvelle espèce, sont décrits sur la base d'un spécimen unique trouvé dans la formation Wenchang de l'Ordovicien, dans le Zhejiang, en Chine. Ce taxon constitue le plus ancien Adelophthalmidae connu. Sa découverte étend l'enregistrement stratigraphique de la famille d'environ 10 millions d'années, qui courre désormais du début du Silurien à la fin de l'Ordovicien[18].
Histoire évolutive

Les Euryptérides en tant que groupe ont atteint un pic de diversité au cours du Silurien[19],[20]. Sur les quelque 250 espèces valides recensées en 2024, environ 139 (≈56 %) proviennent uniquement du Silurien[7]. De nombreux groupes d'Euryptérides sont observés pour la première fois au Silurien, tels Pterygotioidea, Mycteropoidea, Stylonuroidea et Adelophthalmoidea. Les membres les plus primitifs d'Adelophthalmoidea ont évolué en Laurussia (un ancien supercontinent, également connu sous le nom d'Euramerica). L'espèce la plus basale connue du clade (Eysyslopterus patteni) a été découverte dans des dépôts du Ludlow (environ 427-423 millions d'années ) du paléocontinent Baltica (Scandinavie et Europe de l'Est, précisément en Estonie). Il n'est toutefois pas possible de déterminer précisément l'origine du clade : probablement le Baltica ou le Laurentia (majeure partie de l'est de l'Amérique du Nord continentale contemporaine). Bien que la plupart des représentants d'Adelophthalmoidea aient été découverts en Laurentia, Avalonia (Allemagne, Grande-Bretagne, certaines parties de l'est de l'Amérique du Nord) et Baltica (c'est-à-dire Laurussia), le genre Adelophthalmus, quasiment cosmopolite, était également présent dans la Zone rhénohercynienne (Europe occidentale et centrale), le Craton sibérien et dans la partie issue du supercontinent Gondwana de l'actuelle Australie[19].
La plupart des genres d'Adélophtalmides sont apparus au Silurien, et tous ont disparu peu après ou au Dévonien moyen[19]. Les plus anciens représentants du groupe sont Parahughmilleria maria et Nanahughmilleria prominens, tous deux du Llandovery (vers 444-433 millions d'années), ce qui suggère que les Adélophtalmides sont apparus à cette époque. Cette hypothèse est confirmée par l'apparition des Ptérygotioïdes basaux, groupe frère des Adélophtalmoïdes, au Llandovery. Les archives fossiles d'Adelophthalmoidea du début du Silurien sont toutefois très pauvres et l'âge des deux espèces demeure donc controversé. Le plus ancien représentant du groupe dont l'âge est sans équivoque est P. hefteri, dont des fossiles datant du début de l'époque Wenlockienne (environ 433-427 millions d'années) ont été trouvés dans la formation de Kip Burn, à Lesmahagow, en Écosse. Toutefois, ces fossiles diffèrent légèrement de ceux ayant permis de décrire l'espèce type (découverts en Allemagne) pour ce qui concerne les proportitions du corps : aussi, ce n'est pas l'âge mais l'attribution des fossiles écossais à P. hefteri qui demeure incertaine. Ces premières espèces d'Adélophtalmides vivaient dans des eaux saumâtres estuariennes ou dans des habitats entièrement marins[10]
La première espèce du genre Adelophthalmus, A. sievertsi, apparaît au cours de l'Emsien (vers 393–408 millions d'années, au Dévonien inférieur). Elle présente des caractères basaux tels que de larges palettes natatoires (comme chez Nanahughmilleria et Parahughmilleria)[21]. Les Euryptérides sont l'un des groupes les plus touchés par l'extinction du Dévonien. Après un déclin majeur de diversité au cours du Dévonien précoce, les Euryptérides sont devenus rares dans les environnements marins du Dévonien tardif. Parmi les 16 familles d'Euryptérides qui vivaient au début du Dévonien, seules trois ont persisté au Carbonifère, toutes étant étant groupes non marins[22]. Le sous-ordre des Eurypterina s'est presque complètement éteint, les Adelophthalmoidea (représentés par Adelophthalmus) en constituant les derniers survivants[23].

Adelophthalmus, qui est déjà présent en Siberia et au Gondwana (Australie) depuis le Dévonien, se diversifie rapidement. Au Carbonifère, la distribution d'Adelophthalmus est approximativement circuméquatoriale (autour de la terre, le long de l'équateur)[19]. Parmi les 33 espèces référencées dans le genre Adelophthalmus, 23 (69 %) proviennent uniquement du Carbonifère[7],[9]. Le pic de diversité est atteint au Carbonifère supérieur[11]. Adelophtalmus devient le plus commun de toutes les Euryptérides au Paléozoïque supérieur[3]. Cette diversification rapide est peut-être due à la morphologie des Adélophtalmides, qui en fait l'un des meilleurs nageurs parmi les Euryptérides. La collision des précédents supercontinents en un supercontinent quasi unique et mondial, la Pangée, a probablement joué aussi un rôle important. Les Ptérygotoïdes, qui étaient également de bons nageurs, ont disparu au Dévonien moyen, bien avant la formation de la Pangée[19]. Bien qu'Unionopterus soit également apparu au Carbonifère, ce genre reste peu connu et généralement ignoré par les chercheurs qui s'intéressent aux Euryptérides[3].
À la fin du Carbonifère et au début du Permien, Adelophthalmus vit dans des environnements d'eau saumâtre et d'eau douce adjacents aux plaines côtières, un type d'habitat commun et stable à cette époque. Bien que la formation de la Pangée ait contribué à la propagation du genre, elle a également affecté son environnement. Le changement climatique consécutif a provoqué des modifications de la flore et de la sédimentation à travers le monde, provoquant une diminution du nombre d'espèces[24]. A. sellardsi, de l'Artinskien (environ 290-284 millions d'années, début du Permien, Kansas, États-Unis) est la dernière espèce d'Adelophthalmus et donc de tout le sous-ordre des Eurypterina[7],[2]. Le genre Adelophtalmus a permis à lui seul d'étendre la répartition temporelle du sous-ordre Eurypterina d'environ 100 millions d'années[23]. Il a fait de sa famille, Adelophthalmidae, la famille d'Euryptérides la plus durable[19]. Les Euryptérides ont toutefois continué d'exister après la disparition d'Adelophtalmus, représentés par les Stylonurides. L'espèce d'Hibbertoptéride russe Campylocephalus permianus a vécu jusqu'au Changhsingien (environ 254-252 millions d'années, Permien supérieur) : c'est le dernier Euryptéride connu[19]. Aucun Euryptéride n'a été découvert dans des couches fossiles plus hautes que le Permien, ce qui semble indiquer que le groupe s'est éteint lors de l'extinction massive du Permien-Trias ou peu avant[25].
Classification
Phylogénie externe

Les Adelophthamides sont classés dans l'infra-ordre Diploperculata, dans le sous-ordre Eurypterina des Euryptérides[7]. L'infra-ordre Diploperculata contient les quatre superfamilles les plus dérivées d'Euryptérides Euryptérines : Carcinosomatoidea, Adelophthalmoidea, Pterygotioidea et les Waeringopteroïdes, qui présentent comme caractère commun un opercule génital (structure contenant l'appendice génital) constitué de deux segments fusionnés[26].
Adelophthalmoidea est l'un des clades d'Euryptérides les plus diversifiés sur le plan taxonomique, avec environ 40 espèces décrites. Le groupe frère des Adelophthalmoidea, Pterygotioidea, dépasse ce nombre avec environ 50 espèces décrites, constituant ainsi la superfamille la plus diversifiée à ce jour. Ces clades frères sont les plus dérivés parmi les Eurypterina et représentent plus d'un tiers de toutes les espèces d'Euryptérides, avec près de 100 espèces au total pour les deux clades[19].
Le cladogramme ci-dessous est une version simplifiée d'une étude de 2007 réalisée par O. Erik Tetlie, mettant en évidence la position des Adelophthalmoidea au sein du sous-ordre des Eurypterina[19]. La position de Diploperculata dans ce cladogramme est basée sur Lamsdell et al. 2013[26].
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Phylogénie interne

Tous les Adélophtalmides ont une série de caractéristiques communes qui les différencient du reste des Euryptérides[3]. Certains genres ont développé des caractéristiques propres au sein des Adelophthalmidae, ce qui divise la famille en plusieurs clades et groupes plus petits. Les genres Parahughmilleria et Adelophthalmus forment un clade dérivé caractérisé par la présence d'épines élargies sur au moins un podomère de l'appendice V (cinquième membre), la présence d'épimères dans le postabdomen (segments du corps 8 à 12) et de grandes spatules qui ont été associées à l'opercule génital. Nanahughmilleria est positionné comme taxon frère de ce clade mais plus basal en raison de la spinosité accrue de son appendice V et de la petite taille des spatules génitales[10],[3]. Bassipterus et Pittsfordipterus sont positionnés comme relativement plus basaux par rapport à ce clade et forment un groupe caractérisé par deux synapomorphies (caractéristiques partagées différentes de celles de leur dernier ancêtre commun) : des yeux longs et étroits et une terminaison complexe de l'appendice génital[10].
À la base de la famille, Eysyslopterus a été interprété comme l'Adélophtalmide le plus basal. La carapace de ce genre est pratiquement identique à celles de Herefordopterus et Orcanopterus qui se différencient principalement par la position des yeux. Chez ces derniers, les yeux sont quasiment marginaux, mais demeurent séparés de la marge par le bord marginal. Les yeux d' Herefordopterus sont complètement marginaux, une caractéristique présente dans tous les genres Ptérygotioïdes. Bien que les yeux d'Eysyslopterus soient intramarginaux, ils sont beaucoup plus proches de la marge que chez les membres proches de la famille, ce qui suggère que les yeux ont progressivement migré vers le centre de la carapace, depuis les genres basaux en allant vers les Adelophthalmus dérivés. La position des yeux d'Eysyslopterus a conduit certains chercheurs à se demander s'il s'agit bien d'un Adélophtalmide ou plutôt d'un taxon frère des Adelophthalmidae : davantage de fossiles seraient nécessaires pour prouver ou réfuter sa position phylogénétique au sein ou en dehors de la famille[10].
Le cladogramme ci-dessous présente les positions phylogénétiques de la plupart des genres inclus dans les trois superfamilles les plus dérivées du sous-ordre des Eurypterina Euryptérides (Adelophthalmoidea, Pterygotioidea et les Waeringoptéroïdes). Ces positions sont déduites des travaux d'O. Erik Tetlie et Markus Poschmann de 2008 basés sur les résultats d'une analyse de 2008 portant spécifiquement sur les Adelophthalmoidea et sur une analyse antérieure de 2004[10].
Diploperculata |
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Paléoécologie

Les Adélophtalmides vivaient dans des environnements situés à proximité du domaine côtier, avec des préférences pour les lagunes, les estuaires ou les deltas, à la salinité réduite. Les horizons (sections de sites fossiles) contenant des Euryptérides sont souvent caractérisés par une influence marine, mais, dans de nombreux cas, les fossiles caractéristiques d'un environnement ou d'un écosystème marin ne sont pas associés aux Euryptérides. Dans certains cas, où les Adélophtalmides sont très rares, les fossiles pourraient avoir été déposés dans un endroit différent de celui d'où ils proviennent, comme l'illustre le cas d'A. waterstoni, connu à partir d'un seul spécimen, unique Euryptéride de son lieu de découverte, la formation Gogo d'Australie, où plus de 2 000 crustacés ont été découverts[27].
Les premiers Adélophtalmidés, comme l'écossais Parahughmilleria hefteri, ont été découverts dans des habitats estuariens saumâtres non marins, mais avec une possible influence des marées. On connaît aussi des formes basales découvertes dans des dépôts entièrement marins. Quoi qu'il en soit, la préférence des Adélophtalmides pour les habitats marins ou avec une influence marine est restée constante jusqu’à l’apparition d'Adelophthalmus. Dans les dépôts du Dévonien inférieur d'Allemagne, où coexistent Parahughmilleria hefteri et Adelophthalmus sievertsi, on observe une influence marine plus évidente dans les sections dominées par Parahughmilleria que dans celles dominées par Adelophthalmus. Cela suggère qu'Adelophthalmus avait une préférence pour les habitats dominés par l'eau douce, contrairement à d'autres formes plus basales. Cette préférence pour les habitats d'eau douce est plus marquée au cours du Bachkirien et du Moscovien (fin du Carbonifère), périodes au cours desquelles les fossiles d'Adelophthalmus sont associés à des bivalves d'eau douce et à des organismes terrestres dans des strates contenant du charbon (ce qui indique un environnement de marais charbonnier)[10].
Toutefois, cela pourrait traduire une diversification d'Adelophthalmus à ces périodes plus qu'un changement d'habitat de l'ensemble du genre. La plupart des espèces d'Adelophthalmus étaient confinées dans des bassins paraliques (eaux peu profondes près de la côte) ou de basse altitude, dans des environnements de dépôt qui avaient un lien étroit avec des habitats marginalement marins. Par exemple, au cours du Moscovien, le bassin de Sarre-Nahe (où des fossiles d' A. granosus ont été découverts), était connecté voire faisait partie d'une vaste zone de subsidence occidentale (zone d'affaissement) dont le drainage s'écoulait vers l'océan Paléotéthys, à quelque 1 500 kilomètres (930 miles) plus au sud. Au cours du Pennsylvanien tardif et du Permien précoce, en raison du soulèvement du sud de cette zone, le drainage a commencé à s'écouler vers le nord en direction de l'océan Panthalassa, augmentant la distance jusqu'à l'océan (environ 2 400 km, 1490 mi). Adelophthalmus n'a pas été trouvé dans ces dépôts, alors que d'autres fossiles traduisant une connexion avec un habitat marin marginal, comme les Bélinuridés Xiphosurans, y ont persisté. Certaines des dernières occurrences d'Adélophtalmides (de la fin du Carbonifère au début du Permien) semblent avoir connu une sorte de réversion des préférences écologiques, en habitant à nouveau des environnements à forte influence marine, en particulier les environnements estuariens à marées[10].
Les Adelophthalmidae sont considérés comme un clade euryhalin (capable de s'adapter à différentes salinités) qui habitait des habitats stressants du point de vue de la paléosalinité et peut-être de l'oxygène, et dont la conquête des habitats d'eau douce n'a pas été aussi réussie que chez d'autres animaux comme les Bellinurides susmentionnés[10].
Liens externes
- Ressources relatives au vivant :
Notes et références
Notes
Références
- (en) Shpinev et Filimonov, « A New Record of Adelophthalmus (Eurypterida, Chelicerata) from the Devonian of the South Minusinsk Depression », Paleontological Journal, vol. 52, no 13, , p. 1553–1560 (DOI 10.1134/S0031030118130129, Bibcode 2018PalJ...52.1553S, S2CID 91741388, lire en ligne)
- (en) Lamsdell et Braddy, « Cope's rule and Romer's theory: patterns of diversity and gigantism in eurypterids and Palaeozoic vertebrates », Biology Letters, vol. 6, no 2, , p. 265–269 (ISSN 1744-9561, PMID 19828493, PMCID 2865068, DOI 10.1098/rsbl.2009.0700, lire en ligne)
- (en) Tetlie et van Roy, « A reappraisal of Eurypterus dumonti Stainier, 1917 and its position within the Adelophthalmidae Tollerton, 1989 », Bulletin de l'Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique, vol. 76, , p. 79–90 (lire en ligne)
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- (en) J. A. Dunlop, D. Penney et D. Jekel, World Spider Catalog, Natural History Museum Bern, , « A summary list of fossil spiders and their relatives »
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- Lamsdell, McCoy, Perron-Feller et Hopkins, « Air Breathing in an Exceptionally Preserved 340-Million-Year-Old Sea Scorpion », Current Biology, vol. 30, no 21, , p. 4316–4321 (PMID 32916114, DOI 10.1016/j.cub.2020.08.034, S2CID 221590821)
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